Paul et Marie étaient aux champs, de leurs amours encore tout ravis, lorsque le tocsin retentit.

Ces cloches funèbres me semblent encore tinter à mes oreilles. Non le tocsin de l’incendie, mais celui de la grande boucherie, celle qui emporte amants et maris.

Oh! Que le jour du départ fut triste pour eux!

Paul eut pour son aimée un ultime sourire d’adieu qui dans les pleurs s’éteint.

Quelqu’un de vous peut-il sans frémir songer à son destin?

Au terme d’un éreintant voyage, il s’avança vers le carnage, comme tous les jeunes hommes de son voisinage.

Ils ne furent pas longs à percevoir un grondement lointain, comme un signal d’approche, et voilà qu’ils luttaient déjà, maintenant, sourds, effarés, gueules béantes.

Et quand la mitraille, qui dès l’aube mugissait, jetait en tourbillons ses flammes rouges de sang humain, ils souffraient et gémissaient, leurs bouches de cris tordues en muette prière.

Le conflit s’éternisant, Paul dans la neige et la boue allait à présent s’empêtrant.

“Ce cauchemar aura-t-il donc jamais une fin?” – songeait-il dans ses nuits morbides – en appelant de son cœur le visage de Marie, demeurée au pays et qui, sous sa peine accablée pensait si fort à lui.

Les nids turent leur mélodie lorsqu’il alla lui aussi rejoindre le cimetière immense, fangeux et sans horizon où gisaient, aux lueurs d’un soleil blanc et terne, ses confrères d’horreur, aux larges yeux froids, chargés d’éternité.

À l’oubli dont la mort commence à le couvrir, préférons, je vous en supplie, souvenir et repentir.

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