AlgoZimage du 18 août 2023

MERIDIENNE

Elle avait installé la vieille chaise longue en bois et rotin dans un coin calme, un peu retiré de la maison, à l’ombre des arbres, au bout du jardin, avec vue sur les eaux bleues glacier du lac qui lui donnait l’impression qu’il faisait plus frais ici.

Elle n’avait pas pris encore le temps de s’y poser, mais là ! Ce fut comme une envie subite. Elle les a laissés. Il devait être quatorze ou quinze heures, elle ne savait plus, cela n’avait pas d’importance.

C’était un moment à elle, dans la torpeur de l’été ! Un moment sans bruit, sans les cris des enfants, les apostrophes des hommes qui se souvenaient d’elle que pour demander. Les enfants tiens, c’est vrai, où sont-ils ? Sans doute dans les chambres, ou dans la campagne, ou avec leur père… Elle les chasse de sa tête !

Elle a quitté les hommes toujours autour de la table, fumant, discutant politique en buvant de la fine, du café. Elle a quitté la vaisselle à faire dans la cuisine, celle restant sur la table, les bouteilles de vin, les carafes d’eau, les reliefs du repas, le restant de tarte, la corbeille de pêches, les verres.

Elle est allée la retrouvée, la vieille chaise longue. Elle s’est installée, a écouté le silence, pas un bruit, même pas le chant d’un oiseau. Il fait trop chaud.

Elle s’est laissée aller dans la torpeur de l’après-midi, a rêvé un peu, a regardé les nuages, les arbres, les fleurs, l’herbe qu’elle a caressé. Un petit moment de rien, une césure dans la journée, un plaisir éphémère.

Doucement ses yeux se sont fermés, il fait chaud, elle est bien, elle soupir et s’endort.

Personne ne la dérangera, pas même le peintre dans son coin, en silence, en douceur il peint. En silence, en douceur, dans la torpeur de l’après-midi elle devient immortelle.