Dans les bouges où la fumée âcre en brouillard gris se diffuse, elle s’absente d’elle-même, elle s’absinthe, elle s’oublie.
Elle s’obstine à boire, amère ironie d’une vie sans gloire que plus rien n’amuse.
Son chapeau est fripé, ses dentelles chiffonnées, son taffetas froissé, ses bas de soie troués. Ses escarpins n’en peuvent plus de battre le pavé.
La carafe est déjà vide et d’un regard las, vague et sans éclat, elle contemple son verre, consciente que cette ivresse d’un soir est loin d’être la dernière.
Son cœur, il est semblable au rocher isolé que les flots n’osent jamais venir caresser.
Son homme à ses côtés s’absorbe dans ses pensées. Ils sont ensemble comme deux étrangers et lui ne partage avec elle que la sombre patine de ses habits de velours élimés et mités.
Devant un bock, rêvant d’une bonne pipe, il observe le monde autour et, dans une méditation stérile et cynique, vient à en convenir qu’après tout il s’en moque.
Derrière eux l’antique miroir aux reflets irisés comme un fragment d’opale tourne sans pitié le dos à ce pathétique couple d’anciens tourtereaux.
Superbe
Très beau texte si touchant
Oui, pathétique, c’est bien le mot. Vous avez su donner l’ambiance. Je relis ce texte que je n”avais pas commenté.
Merci, @melanie chaine.
Quelle belle écriture ! Ciselée. J’aime beaucoup, c’est puissant.
Merci, @ALDOR! Aurons-nous le plaisir de vous lire bientôt?