Les mots, les onomatopées, les locutions et les aphorismes cinglaient son visage alors qu’elle se dirigeait à l’aveuglette vers son atelier d’écriture. Elle avait oublié dans la voiture de son oncle son paramots qui d’habitude la protégeait de ces averses soudaines autant qu’intempestives.

    Elle devait encore courir sur les trottoirs jonchés de mots glissants et traverser le petit bois où elle espérait trouver un abri éphémère sous les branches métalliques des chênes et des hêtres. Elle fit une halte sous le couvert des feuilles d’acier, tremblante du tremblement douloureux des crapauds. Le ramage laissait tomber sur sa nuque des mots aussi désagréables que  “visqueux”, “grouillant” et “glacial”.

    Elle reprit sa marche rapide alors que des phrases entières se détachaient maintenant d’un ciel gris journal. Elle haletait sous les averses et peinait à lever les pieds dans le magma spongieux qui encombrait le sol. Elle poussa la porte de l’atelier avec soulagement. Elle enleva son manteau et ôta les derniers mots qui s’accrochaient encore au tissu. Elle les déposa sur la table avec harmonie et y puisa l’inspiration avant de prendre son crayon.

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