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Beaux enfants du Mekong, garçonnets pieds-nus en tongs, fillettes en sarongs, vous couriez chaque jour droit vers la grève comme en un étrange rêve.

Vos grands yeux sombres ourlés de cils recourbés semblaient en silence questionner notre occidental monde de manière si profonde…

Le frais soleil armoricain achevait de dorer le brun miel de vos teints et l’air chargé d’embruns perlait délicatement de sel vos visages parfois chagrins.

De vos lèvres encore malhabiles émergeait un nouveau babil subtilement ponctué de notes légères aux accents khmers de la terre de vos pères.

Vous craigniez le moindre chien pour avoir sans doute par trop subi dans les camps ceux des gardiens, et les avions au ciel n’étaient pour vous que porteurs d’horribles nouvelles, étincelles de fer, lueurs meurtrières, folie de la guerre.

Un simple et frêle esquif pouvait, sans qu’on l’ait anticipé, traquer vos plaies les plus à-vif et faire renaître alors l’hystérie collective que vous aviez vécu à bord des rafiots de fortune sur lesquels, entassés, vous aviez entrepris la longue traversée.

Vous aviez pour prénoms Chamroeun, Sothy, Nhean, Sovannar ou Chanlina.

Qu’est-il advenu de vos vies?

Dommage que je ne le sache pas.

 

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