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Ta main, on dirait une vraie carte topographique. Regarde-moi ce linéament ! Beaucoup trop rectiligne. Ce n’est pas normal. Aucun accident tectonique en vue. Tu n’es pas humain, si ? Robot ? Ta vie semble si bien tracée. Pas d’anicroche ? Qu’en penses-tu ? Pas d’idée ? C’est si prévisible… Mais que vais-je bien pouvoir faire de ça ?

Je comprends mieux, maintenant, pourquoi ta femme m’a demandé de lire les lignes de ta main. Elle commence à avoir peur de ton ennui. Cette ligne, si droite, en plein milieu de la main, c’est bof, pas très motivant. On dirait qu’elle est tracée à la règle. Jamais vu ça…

Bon, je reprends de zéro. C’est bien ta main gauche. Je vois les lignes habituelles : la ligne de cœur, la ligne de tête, la ligne de vie et la ligne du destin… La fameuse ligne du destin. L’avenir… C’est bien celle-là que je trouve étrangement rectiligne. Tu es bien raide, gentil soldat de la matrice. Si obéissant sur la planète… Pas grand-chose à dire de plus là-dessus.

Bon, ta ligne de cœur débute bien sous ton index et se prolonge normalement sur toute la largeur de ta main. Bon, alors, de ce côté-là, il semblerait que tout va bien et que tu es satisfait. C’est une bonne chose. Quand je regarde ici, tu vois le petit tracé ? C’est comme une passerelle entre ta vie et le vide. C’est vide ici, oui. Intrigant… Mais n’oublies pas… la « passerelle », en langue des oiseaux, c’est « passer’elle », ou « passé-par-elle » si tu vois ce que je veux dire. Keysa ? Ta femme ?

Ta ligne de tête… voyons… la forme schématique d’un avion, jamais vu ça. Décidément. Fais-voir… J’entends « aéronef ; passagers ; danger ; émeute ». Oh là. Ça vibre. Ton corps vibre. Tu en as ras-le-bol d’avancer comme tu le fais depuis… J’entends « verbe ». Depuis que tu prêches. Tu prêches ? Je ne savais pas. Quelque chose ne te convient plus ? Trop de mots ? Que se passe-t-il dans ta dimension intérieure ? Tu sembles très déterminé pourtant, mais tu as besoin de te poser, te reposer, de silence intérieur. J’y suis. Tu es configuré par autre chose que toi. La matrice, ça te parle ?

Oui, ta ligne de vie, j’y suis : elle démarre près du pouce, tu es souvent fatigué, trop de mouvements, trop d’émotions refoulées. Non, tu n’es pas si sage. Comment te dire ? La colère vient. Je vois comme une armure de robot qui se brise et tombe au sol tandis qu’un être de chair en sort avec une épée à la main et un hurlement guerrier à la bouche. Un seul hurlement, de dépit et d’étonnement. Tu réalises que TU sors de l’armure que l’on t’avait imposée. L’image floue de ta femme devant toi qui devient nette ; elle est avec toi, le sourire aux lèvres, heureuse de te voir prendre conscience de toi.

Ne bouge pas s’il te plaît. Tu trembles… La ligne du destin est celle qui va tout sceller, ou pas. Bien tracée, avec deux bulles, tu vois. La première pourrait correspondre à aujourd’hui ; ta vibration qui change. Tu t’immobilises en silence. Tu te décales d’une version obsolète de toi. Déplacement hors de la matrice en cours. Ouiii… Je vois le guerrier débarrassé de ses armes. Un Adam stupéfait au regard profond. Dans la seconde bulle, tu es debout, Keysa dans ta main ; le mot « avènement » s’inscrit dans l’énergie. De nouveaux habits pastels, très doux au toucher. Suis ton rythme, tes vagues intérieures ; le destin n’est pas pressé. Le temps n’existe pas. Prends le temps de faire apparaître tes vraies pensées, tes vrais désirs… Ta femme est là, elle est avec toi. Vous avancez désormais dans le même mouvement.

Il n’y a plus de prêcheur, plus de guerrier, plus d’Adam. Qui est là dans ta forme ?

Respire, tout va bien. Reste tranquille encore un moment.

Non, redonne-moi la main, ne te lève pas encore. Tu as une main d’artisan ferme et puissante, une forme un peu carrée, bien vissée à ton bras. Solidité, opiniâtreté. Je sens la force du minéral en toi. Je vois le cœur de la terre relié à ta main. Des couleurs minérales, des pigments et des pinceaux. Garde cette image et approche-toi de sa réalité. Approche-toi encore, rentre dans la scène, vas-y tout doux, entre… Laisse les couleurs mener ton corps, laisse les nuances t’envelopper et te faire respirer… Tu vibres autrement. Ressens, vois comme des morceaux de verre qui s’effritent autour de toi. C’est la matrice qui se disloque. Libération…

Laisse faire. Tout s’apaise. Tu t’apaises. Ton sourire s’ouvre. Regarde ta main maintenant. Ses lignes ont changé…

 

 

 

 

 

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