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L’écrivain contempla son texte avec ravissement : les mots soigneusement sélectionnés dans des glossaires choisis, les expressions ciselées telles des enluminures verbales, la ponctuation comme une subtile rythmique sous-jacente, toute son œuvre lui paraissait resplendir et chanter son art. Il fut saisi par l’image qui s’imposa à lui : son écrit lui semblait miroiter comme la moire précieuse d’un tabis de soie chatoyant sous la caresse du soleil couchant.
Il avait choisi un support de grand standing pour porter son chef-d’œuvre, non sans difficulté car après s’être fâché avec son fournisseur. La faible qualité des propositions de celui-ci ayant provoqué son ire, le commerçant avait alors exhumé de ses réserves personnelles un parchemin d’exception. Sur cette peau veloutée d’un tendre écru sans tâche il avait calligraphié ses belles phrases comme une danse riche d’arabesques.
L’œuvre était achevée. Conscient du drame qui se jouait maintenant, l’homme ouvrit le coffre-fort. Il ne pouvait courir le risque double de mettre sous des yeux non avertis la splendeur de sa création. Le premier pour l’homme, de rester interdit devant elle, le second plus grave encore pour ce chef-d’œuvre, de ne pas être reconnu. Son âme ruisselant de larmes brûlantes, il enferma le poème nouveau-né dans sa sombre sépulture.

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