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Il y a longtemps je fus d’abord ronde et dorée, sans aspérité ni empreinte, totalement vierge des marques du temps. Vint un jour, ou des mains rugueuses mais solides, me caressèrent d’abord, m’époussetèrent puis m’enserrèrent vivement pour me frapper. Je fus envahie d’une sensation de forte chaleur. Avais-je de la fièvre ?
La douleur fut vive mais rapide. A peine le temps de faire” OUF”. Je découvris alors comme l’enfant que l’on vient de vacciner, une forme que je distinguais peu à peu au travers de mes larmes qui avaient jailli malgré moi. Apparaissait alors un visage déterminé à l’arête du nez bien droite, à la chevelure en partie cachée par un bonnet, au regard difficile à décrire mais volontairement dirigé vers l’avenir.
De jolies lettres finement dessinées dansaient autour de moi.
Il était écrit: “Liberté, Egalité fraternité”….
Je fus ensuite couchée sur un matelas de mousse, enfermée dans un sarcophage de velours. Les émotions m’avaient bien fatiguée. Encore surprise mais parée de mes nouveaux atours, je m’endormis.
Réveillée soudainement, arrachée de mon linceul par des mains fébriles qui me saisissaient promptement, je découvris un visage presque juvénile qui se penchait sur moi avec amour.La jeune femme, passa délicatement un ruban de soie bleue dans le petit anneau d’or qui me surplombait. Elle l’attacha autour de son cou. Je me balançais alors joyeusement, je m’immisçais dans son décolleté, je caressais sa peau délicate, j’apercevais aussi le grain de beauté sur le haut de son sein gauche. Je m’ouvrais alors à des délices encores inconnus.
Le soir venu, elle m’abandonnait, me suspendant dans le vide à un crochet tel un pendu désepéré. Le froid de la nuit m’engourdissait. Le lendemain, après s’être vêtue, elle ne m’oubliait jamais, elle glissait alors un autre ruban dans ma boucle d’or. On peut dire que j’en ai vu de toutes les couleurs!
Elle alllait et venait, j’étais toujours pendue à son cou, il lui arrivait de me saisir dans sa main douce et chaude pour se rassurer peut-être. Mon bonheur était alors à son apogée.
Un jour, elle se rendit à une réception. je vis des farandoles de bandes bleues blanches et rouges. Je croisais des hommes qui arboraient des cocardes aux mêmes couleurs, à la boutonnière de leurs vestes. Les femmes quant à elles, exhibaient des pendentifs décorés de mes soeurs d’armes. Je m’apercevais, projetée, comme dans un miroir à multiples facettes. Je n’étais plus seule.
Je compris rapidement que j’étais devenue une promesse de jours meilleurs, un gage d’espoir et de justice, ni plus ni moins qu’ un symbole.
J’appris plus tard que l’on m’avait nommée…
La suite de l’histoire, je vous la raconterai sûrement dans un autre chapitre…

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