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L’express ne s’arrêtait jamais dans la petite gare de Le Tannos. Il ne faisait qu’y passer, à très vive allure. Une jeune femme, tout enveloppée de distinction, s’approcha lentement de la bordure du quai et fit un signe de la main en direction de Marc, chef de gare et de surcroît mon ami d’enfance. Il était impossible de ne pas la remarquer, la regarder, l’admirer tant elle ressemblait à une vraie gravure de mode. Grande et fine, elle portait un joli manteau de drap de laine lavande duquel dépassait élégamment une fluide jupe beige. Ses chaussures d’un beau cuir fauve étaient parfaitement assorties à son sac auquel elle avait négligemment noué un foulard fleuri. Son visage, encadré d’une courte chevelure brune et bouclée, était en grande partie caché par une volumineuse paire de lunettes de soleil, ne donnant à voir que sa bouche joliment ourlée d’un beau rouge mat. Subjugué par sa beauté, j’accompagnai Marc qui s’approchait à sa demande.
–    Que puis-je pour vous madame ? s’enquit-il
–    S’il vous plait, monsieur, pouvez-vous me confirmer l’heure à laquelle l’express en provenance de Dijon va passer ?
–    Le train traversera notre gare à 15h42, madame, mais aucun arrêt n’y est prévu. C’est la micheline de 16h50 qui nous amènera les voyageurs en correspondance depuis la ville.
–    Merci, monsieur, dit-elle tout simplement et sans autre commentaire, avant d’aller s’asseoir sur le banc qui faisait face à l’arrêt mentionné pour la 1ère classe.
Je lançais un regard intrigué à mon ami. Tout en s’éloignant avec moi en direction du petit bureau d’accueil, Marc me confia une étrange histoire.
–    Elle va rester là jusqu’à ce que l’express passe, puis se lèvera et partira sans oublier de déposer un courrier dans la boite à lettres près du bar de la gare. Depuis 8 ans que je suis en poste ici, je la vois chaque dernier dimanche du mois répéter le même rituel. Seule sa tenue change selon la saison, mais toujours aussi élégante. Elle est devenue une légende au village où on la surnomme la Belle de l’Express. On murmure qu’elle attend le retour de son fiancé, un militaire parti quelque part en Afrique il y a presque dix ans. Est-il mort ? L’a-t-il quitté ? Personne ne sait, tout le monde imagine. La seule mais bien triste réalité c’est que la constance et l’espoir ne pouvaient prendre plus belle figure chez nous.

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