« Se recueillir profondément dans la solitude c’est donner une âme à cette solitude »

Le poète avait-il raison ? Aussi loin que portait son regard, aucune terre n’émergeait de l’étendue aqueuse. La vallée noyée était devenue lac aux eaux sales, grises et boueuses. Et maintenant, les pluies torrentielles avaient laissé place à un crachin persistant, sorte de pied de nez météorologique, ne laissant augurer aucune chance d’une quelconque décrue rapide. La route départementale serpentait dans ces profondeurs aquatiques, son cheminement se devinait grâce au ruban d’arbres qui la bordait et traçait une étrange frontière pointillée sur la surface ondoyante. Comme un phare émergeant des éléments, le calvaire, de sa haute et fine silhouette sculptée, signalait le carrefour menant au hameau voisin. Un pauvre sourire amer se dessina sur son visage trempé. C’est au pied de ce repère religieux que la procession des rogations avait convergé au cœur de l’été, quand le soleil brûlait avec obstination cultures et champs enherbés, quand l’air surchauffé tremblait avec la population qui suppliait le ciel désespérément bleu de lui donner un peu d’eau. Avaient-ils trop prié ? ou bien une divinité vengeresse les avait-elle punis d’avoir fait les fanfarons sur la terre ?

Comme les lourds nuages ne pouvaient contenir les averses incessantes des derniers jours, l’agriculteur n’arrivait pas à tarir le flot de ses larmes, laissant ruisseler sa tristesse, absurdement dépité d’ajouter un peu d’eau salée à cette marée tragique.

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