Joseph l’innocent, chapitre 6, les vacances – suite @melanie

Joseph, craignant les ados-envahisseuses, s’était levé dès potron-minet pour sa corvée d’eau puis avait disparu pour une belle randonnée en remontant le lit de la fougueuse Romanche aux eaux d’un blanc bleuté et laiteux. Éperdus de bonheur, on eût dit que Balou et son maître montaient vers les étoiles en grimpant dans ce paysage somptueux du parc des Écrins, jusqu’à la source de la rivière.
Les filles, pour ce premier jour, s’étaient donné quartier libre. Après un solide petit-déjeuner, dont les composants avaient été largement collectés auprès des mères généreuses et attentives, elles partirent à la découverte de la fontaine aux eaux glaciales des plus revigorantes. Le hameau résonna soudain de cris aigus plus forts que ceux des choucas en détresse. La toilette fut vite expédiée tant l’eau fouettait le visage.
Incorrigibles citadines, elles n’ont pas résisté à dégringoler jusqu’au village. Elles, qui se vantaient de venir chercher l’ivresse des cimes, avaient vite découvert un autre plaisir, ce qui deviendra un cérémonial durant tout le camp : un petit verre (ou deux !) de génépi dans le seul bar minuscule du Villar !
Elles remontèrent au gîte, chargées de quelques provisions, encore plus gaies qu’à la descente. L’elixir leur avait donné des ailes.
En arrivant, Nanou la timide prit sa guitare, s’installa contre le vieux mur et commença à gratter son répertoire : Brassens, Le Forestier, Duteil, sans oublier l’incontournable « jeux interdits ». Trois maisons plus loin, Joseph, rentré de sa randonnée, avait tendu l’oreille dès les premières notes. Il osa s’approcher :
– beau !
– merci. Bonjour, comment tu t’appelles ? Moi, je m’appelle Nanou !
– moi Joseph ! beau !
Le regard émerveillé et puéril du garçon contrastait avec son corps vigoureux nourri à l’air de la montagne. Nanou, d’un geste, l’invita à s’asseoir et lui posa doucement la guitare sur ses genoux. Elle ignorait que, ce jour-là, Joseph venait franchir une étape dans la communication avec le monde qui l’entourait et dont il ignorait les codes. La musique avait réveillé en lui le souvenir de son petit jeu musical, si efficace contre ses angoisses de nourrisson. Il était rassuré.
La vieille dame, à demi cachée dans l’encoignure de sa porte d’entrée, regardait la scène, l’œil tendrement humide.

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