Aujourd’hui, samedi 22 janvier 2022, notre petit village est triste. Père Jean, notre prêtre, a rejoint cette nuit les étoiles.
Monsieur le Maire, m’a chargé de ranger ses effets personnels avant la venue de son remplaçant.
Je décide de commencer par vider son armoire. Une à une, je prends les piles de vêtements, quand quelque chose tombe sur le parquet. C’est un petit carnet noir. Que faire ? Oser ou pas oser ? Ma curiosité est plus forte de ma raison.
C’est le journal intime du Père Jean. Il date des années 1942 à 1965. Les pages sont un peu jaunies par le temps, mais l’écriture est bien lisible. Le prêtre a écrit presque tous les jours jusqu’en octobre 1965, date à laquelle il s’est engagé auprès de l’église. Bizarrement, après quelques feuilles blanches, il a repris son écriture. Exactement, le 10 juillet 2010. Je me rappelle bien de cette journée. Une femme très élégante est venue au village et voulait rencontrer Monsieur le Curé. Nous n’avons que très rarement des visiteurs. Je chausse mes lunettes et je lis :
“10 juillet 2010. Aujourd’hui n’est pas un jour ordinaire. J’ai besoin de me confesser. Oh ! Je n’ai pas fauté, mais mon coeur est bouleversé et de poser ces mots va peut-être me calmer. Cette femme, mais je devrais dire plutôt Ma Fille est venue me voir. Elle s’appelle Jeanne. C’est son anniversaire aujourd’hui et elle voulait le partager avec moi. Elle a appris mon existence en rangeant les papiers de sa maman, Christine, décédée il y a quelques jours. Cette naissance a été cachée de tous, mais jamais Jeanne n’a souffert de l’absence d’un père, tant sa mère lui a donné d’amour.
Christine, oui bien sûr, je m’en souviens. Nous nous sommes rencontrés à la fête foraine quelques temps avant ma décision de rentrer dans les Ordres. Nous nous sommes aimés, mais l’amour de Dieu a été plus fort. Elle a pleuré. Elle a compris. Elle n’a rien dit. Je ne me suis douté de rien. Je suis parti.
Je leur demande pardon.
Jeanne m’a donné son adresse et je peux l’appeler. Elle ne m’en veut pas. Elle comprend….un peu…. Je l’admire. Je prierai pour elle”.
Je referme ce petit carnet noir et le glisse dans ma poche. Je vais appeler Jeanne et le lui remettre en souvenir de son papa.

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