Chapitre 5 – La convocation 

Trois flics et une femme au regard sombre mais dans l’ensemble plutôt jolie l’attendaient dans un bureau en désordre . Sur la convocation, le motif de l’entretien mentionnait un rappel à la loi.

Victor avait beau ressasser les événements de ces derniers mois,  il ne trouvait  rien de répréhensible dans ses agissements récents. Il avait bien fait quelques âneries de bizuth lui valant un « presque attentat à la pudeur » durant sa première  année d’études, mais c’était du passé et franchement même les policiers du seizième arrondissement de Paris avaient beaucoup ri, lorsqu’il était sorti d’un café, un plateau à la main et un torchon dans l’autre comme seuls effets personnels…

Cette convocation à 8 h du matin au commissariat  du Quinzième, le lendemain de son séjour aux urgences n’avait décidément aucun sens! Qui était à l’origine de cette convocation? Et surtout, pour quelles raisons?

– Mr Victor … vous avez tenté de profiter de la fragilité d’une femme perturbée pour vous faire embaucher dans un métier  dont vous n’avez , si l’on en juge votre Curriculum  Vitae, absolument aucune expérience. Vous conviendrez que sachant cela, il soit douteux de postuler à de telles fonctions.

Cette belle policière , pourquoi le regardait-elle avec une telle sévérité ?
Victor se crispe. Sa jambe lui fait mal et les allégations contre lui le laissent sans voix. Bientôt il sera accusé de s’être rompu le tendon d’Achille pour approcher une vieille femme fantasque… 

– Peut-on connaître monsieur Victor, les vraies raisons qui vous poussent à abandonner vos recherches au CNRS? 

– La Vie, madame la commissaire, la Vie! Allez-vous me mettre en garde à  vue pour cela?Sachez qu’il ne s’agit pas d’une vieille dame. Elle n’a que 70 ans! 
J’ajoute à votre connaissance le fait que j’ai mon brevet de secouriste. Il n’est pas mentionné sur mon cv, certes, mais en même temps je ne m’attendais pas à être convoqué à la police judiciaire pour un profil Linkedin mal renseigné!

– Inutile de faire preuve de sarcasmes monsieur ! Cette femme a 75 ans et non 70… Elle nécessite beaucoup d’attentions. Elle est très agitée  et développe de nouvelles idées saugrenues chaque jour. 

Les collègues de la commissaire hochaient la tête à chaque phrase pour donner du poids aux propos de leur hiérarchie. 
Victor, souriait du coin de la bouche, il se serait cru dans un remake féminin des gendarmes de St Tropez. Cette  commissaire « Cruchot » avait  beaucoup plus de charme que l’original mais le casting des associés était parfait.

– Oui, j’ai effectivement pu entre apercevoir sa vivacité d’esprit. Elle m’a parlé de sa fille qui lui mène la vie dure, mais elle ne se laisse pas écraser, et j’avoue qu’elle m’a touché. Faute d’avoir une telle maman, je m’en fais une amie doublée d’une employeuse avec un vrai plaisir. Je suis content et je me crois tout à fait capable de veiller sur une telle personne!

Les regards le toisaient, glacés et surtout glaçants… si bien que Victor sur la défensive  ajouta:

– Je me demande ce qui vous pousse à faire une enquête à mon encontre. Elle a encore le droit de me choisir moi. Je ne suis pas un délinquant, et de toutes façons, ce n’est pas comme si l’on parlait de votre fille! 

– De ma fille? Non ! De ma mère en revanche…

Victor sourit, gêné, mais agréablement surpris:
– Ah, nous y voilà! Vous êtes…. Sybille?  Oh quelle surprise! Enchanté ! 
On va donc faire un peu le même métier. 

Vous policière … et moi «  garde du corps! »  dit-il en y associant un petit clin d’oeil complice à  l’endroit des trois collègues.

– Pour vous, ce sera Commissaire Sybille Panier. Vous apprendrez très vite à ne plus être enchanté à mon contact. Et pour votre gouverne, vous êtes employé en tant qu’aide ménagère et pas garde du corps.

Un pas de travers et je vous coffre pour maltraitance ou négligence à l’encontre d’une personne fragile! Je ne vous ai pas choisi, mais je peux choisir de vous faire coffrer! Tenez-vous le pour dit!

A présent, si  j’ai été assez claire, vous pouvez disposer.

Victor est sonné.

Cette femme était pire que ce dont Sidonie avait parlé.  Elle utilise sa fonction pour asseoir une autorité excessive, le convoque à la première  heure sans offrir un café, et le limoge comme un malpropre sans autre forme de procès . La surprise l’emportait sur la colère, mais il n’en demeurait  pas moins qu’elle avait été très loin et que si sa mère était un élément lourd , la fille s’apparentait à  un élément « super lourd », totalement instable et proche de la réaction nucléaire ultime.

C’est simple, pour le physicien  qu’il demeurait, cette femme magnifique et naturelle était de l’uranium! Puissante, instable et certainement enrichissante. 
Décidément, majordome, ou pas, il aimerait toujours  la physique.

 

https://algomuse.fr/la-fleur-de-lage-chap-4-ma-pie/

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