Le plus cruel c’est la conscience de l’ignorance. Savoir que tu ne sais pas est un bienfait quand il s’agit de connaissance ; en amour, c’est une damnation. Un sortilège maléfique qui libère l’imagination mauvaise. Là, les forces les plus destructrices, les frustrations les plus funestes se mettent en branle pour te faire imaginer toutes sortes d’histoires ; et chaque histoire te déchire un peu plus… Tu sais qu’elle n’est pas réelle, puisqu’elle est le fruit pourri de ton cerveau malade de jalousie ; tu sens qu’elle t’est néfaste et qu’il faut la fuir ; qu’elle te diminue, t’aliène, te réduit, et finira par t’effacer, te gommer complètement si tu n’y prends garde, mais tu persistes à l’explorer… Pourquoi cet acharnement à se faire mal ? quel sens à cet entêtement morbide ? la raison de cette déraison ? La solitude ! Le néant, la négation de toi. L’inacceptable reniement du Nous… Tout ! Tout, plutôt que cette solitude ! Au moins, dans ces délires-déluges de souffrance, tu continues d’être ; et c’est encore un peu vivre… Et tu n’es plus seul ! L’être aimé t’y rejoint. A son corps défendant peut-être, et même sans son corps, et même à son insu, il est là. C’est la seule chose qui compte vraiment… La seule. Le reste n’est que “baratinage”…
Oh, bien sûr, c’est dangereux. Naviguer dans cet univers parallèle qu’est l’imagination d’un fou d’amour ne se fait pas sans risques. Tu crois les mesurer. Tu penses les contrôler… Mais en vrai, l’audace de les affronter n’arrive que quand tu n’as plus d’autre choix ; plus rien à perdre… Largué quoi, il faut être largué pour oser. N’avoir plus rien à espérer… sinon d’un pacte avec le Diable.
tragiquement beau. Qui ne l’a pas vécu ?