Chapitre 20 –  l’enfant de la balle

IL n’a fallu qu’une nuit à Sidonie pour prendre la décision de rencontrer Monsieur Karma, le directeur de la maison de retraite des Mimosas. Dès le matin, elle s’improvisait bénévole.
Son statut d’animatrice  allait lui permettre, ainsi qu’à son assistant Tournesol de se faire entendre. Tout du moins l’espérait-elle. 
Qui de mieux qu’une petite dame âgée ( juste ce qu’il faut), pour gagner le coeur de la maison de retraite?

– Vous savez monsieur Karma, je suis prête à tout pour donner de mon temps à donner de la vie!  
Je ferai des claquettes s’il le faut. Tournesol repeindra les murs et accrochera des tableaux  dignes de ce nom…Vous ai- je dit qu’il était chercheur? Une pointure cet homme! Ce serait gâchis que de vouloir s’en passer! 
Si vous me le permettez, je sais déjà que mes idées vont fleurir plus vite qu’un tapis de muguets au mois de Mai! – La fleur de l’âge monsieur karma, voilà ce qu’il faut cultiver dans ces murs!

Le directeur était un peu bousculé par autant de pugnacité chez une femme d’un âge presque suffisamment avancé pour faire partie des pensionnaires:

– Mais madame Panier, ce n’est pas l’envie qui me manque de donner plus de vie à ce lieu. Seulement, On n’est pas libre.  Il y a des contraintes, un budget, des familles, le CCAS, les normes à respecter…

– Allons donc !  C’est une réponse de gestionnaire de chiffres,  monsieur karma!  Moi je vous propose de gérer les émotions! Et croyez-moi cela se gère sans budget!  
La seule contrainte avec les émotions , c’est celle que l’on se fixe à soi-même! 
Vous ne voudriez pas être une contrainte contre vous-même, monsieur karma?

Le directeur  devait bien se l’avouer, il se sentait parfois dépassé par l’ampleur de la tâche. Il se mit à retracer sa carrière aux deux futurs aides de camps.
Car Tom Karma le connaissait ce métier!  Des personnes âgées, il en avait connu toutes sa jeunesse. 

Son père lui-même avait géré une petite pension, le laissant courir dans les couloirs et écouter les histoires des personnes qui devenaient très vite des membres de la famille. 
A huit ans, il se voyait déjà futur « gardien de vieux » lui aussi! 
Dans une grande bâtisse, telle le manoir des Mimosas. 
Une vocation pour laquelle il n’a jamais failli. Preuve en est.

Comme tous les « enfants de la balle », il s’était formé sur le tas, au côté de son père qui d’ailleurs était depuis peu, présent sur le dit « tas », en tant que pensionnaire des Mimosas.
En vieillissant ce dernier était devenu un « véritable cas d’école ». L’homme autrefois si aimable et soigné s’était mué en  un vieil acariâtre qui  cristallisait à lui seul  tous les travers du grand âge. Le directeur, en bon fils reconnaissant n’y voyait là que la dernière leçon  d’un père  soucieux de former son successeur de la meilleure des façons. 

Pour conclure la brève présentation de son parcours, il finit par ces mots un peu amers:

– Vous voyez, finalement,  une maison de retraite c’est tout aussi passionnant  et pénible à gérer qu’une école : élèves difficiles , cas particuliers, parents exigeants et injustes, personnel compliqué et insatisfait, normes exigeantes … mais sans le côté mignon et charmant de la petite enfance…

– Il n’y a pas que dans la petite enfance que l’on trouve du charme , monsieur Karma… il vous faut reprendre goût et foi en votre vocation, et pour cela vous pouvez  compter sur nous. 
Il faudra peut être parfois s’arranger un peu avec les réglementations mais bon… tout cela n’est qu’une histoire  de  «  cuisine interne », n’est ce pas?

Précédemment dans «  la fleur de l’âge »😉: https://algomuse.fr/la-fleur-de-lage-chap1-ma-pie/

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