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Rangée avec soin dans un écrin de velours crème, alignée auprès de mes sœurs cadettes colorée, je me prélasse langoureusement et me serre amoureusement contre ma voisine.

La semaine dernière, nous avons été conviées à un brunch chez les amis de Sophie, ma maitresse ou nous avons enfin rencontré trois de nos concurrentes originales :

Les premières composées de neuf quilles cavalières légères en pin, sont surnommées « Finlandaises » allez savoir pourquoi ? Leurs visages en biseau ont été tatoués avec des chiffres noirs ! (Elles ont dû chanter un moment quand le poinçon métallique industriel les a frappées) Quant au gros percuteur en bois qui les accompagne : un vrai mastodonte ! Posées en équilibre sur la pelouse les joueurs les maltraitent : leur tête reçoit des coups de batte, leurs gravures s’effacent, elles sont toutes cabossées !

Les secondes représentent deux pimbèches hautes en sapin, surmontées de trois pointes aiguës en guise de couronne. Elles sont prénommées « dames ». Mariées à quatre petites quilles carrées appelées « chevaliers », elles paradent avec orgueil. Ces quatre quilles  n’ont aucune prestance avec leurs blasons respectifs ! Pour les accompagner : deux jeux de trois drapeaux aux couleurs assorties, douze boules (six rouges et six noires). Je préfère ne pas imaginer la dureté de ces dernières lorsqu’elles foncent dans le bois tendre ! Et que de simagrées de la part des joueurs pour mettre en place ces quilles !

Les troisièmes de teinte blanche sortent à la nuit tombée et s’installent au fond d’un couloir sombre avant d’être maintenues par un fil rigide. Les cris stridents, la musique assourdissante, les claquements de mains leur percent les tympans en permanence. Impossible pour elles de s’échapper et d’éviter les énormes boules lourdes qui les percutent à une vitesse fulgurante !

En ce qui me concerne, j’ai été usinée amoureusement par le grand-père de Sophie. Débitée dans un bois de hêtre au grain fin appartenant à la famille, je représente déjà un bijou aux yeux de cet homme. Je dois être « la plus belle » pour ma maitresse ! Sur son tour d’ébéniste, le vieil homme entreprend avec soin ma fabrication. Il commence son bel ouvrage par la pomme de ma tête, réalise avec adresse mon cou arrondi, me caresse délicieusement avant de finaliser son œuvre par mon corps élancé de vingt centimètres. Je ne suis pas encore terminée, mais je me sens déjà aimée et considérée. Il me reste à enfiler ma robe rouge pourpre et mon collier strié d’or grâce au pinceau effilé du grand-père. Un vrai travail d’artiste ! Un coffre d’ébène paré de velours crème m’attend sur le banc de menuisier.

Ainée de ma famille, me voici prête pour rencontrer Sophie !    

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