Ce soir-là grand père Dingo appela Dingo le jeune près de lui:
– « Je me fais vieux, bientôt je serai rappelé dans la prairie des dingos ailés et je partirai en serrant sous mes paupières un regret. Lorsque j’avais ton âge, j’ai rencontré un animal étrange, un calamar, il voyageait pour découvrir le monde avant de retourner à la mer qui l’a vu naître. Il m’a raconté son pays d’eaux et de bleus, de sel et de sable, de soufflés iodés et d’horizons mordorés. Je me suis fait la promesse d’aller un jour à la rencontre de ce monde merveilleux. Le temps a passé dans le bruit des guerres contre les chiens loups puis contre les dingos gris. Aujourd’hui il est trop tard pour moi, mes pattes ne me portent plus ».
   Après une nuit de rêves d’embruns et d’écume, Dingo le jeune se prépara. Il dit au-revoir à son grand-père et prit le sentier du désert qui le mènerait directement vers les forêts de Victoria. Résolu, il traversa des forêts foisonnantes, des bois sombres et s’engagea sur les pentes raides de la montagne. Chamois de velours broutait l’herbe tendre des prés :
– « Où vas-tu Dingo le jeune »?
– « Je fais le voyage que mon grand-père n’a jamais pu faire et je cherche la mer ».
– « J’ai toujours voulu voir l’océan fit Chamois de velours je t’accompagne ».
   Ils gravirent d’autres montagnes, traversèrent d’autres vallées et un matin un espace de pâturages fleuris s’ouvrit devant eux. Mouton soyeux paissait dans l’un d’eux.
– « Où allez-vous Dingo le jeune et Chamois de velours »?
– « Nous accomplissons le rêve de grand père Dingo et allons voir la mer ».
– « Les bains de mer sont excellents pour ma toison de laine, je vous accompagne », renchérit Mouton soyeux.
   Ils marchèrent encore trois jours avant que ne se lève un petit vent frais et une odeur entêtante d’algues iodées. Ils étaient arrivés. Du haut de la falaise ils humèrent cette étendue bleue et se gargarisèrent de ces images inédites.

Sur le sable un drôle d’animal tentaculaire les observait :

-« Je suis Calamar nacré, que cherchez-vous »?

   Dingo le jeune, aidé de Chamois de velours et Mouton soyeux, expliqua la raison et le but de leur périple. Calamar nacré se souvenait de l’accueil chaleureux et fraternel de Grand-père Dingo, du repas partagé et des histoires contées jusque tard dans la nuit. Il glorifia les actes de bravoure et le courage de Grand-père Dingo lors des combats sanglants contre les chiens loups.

   Le lendemain, les trois amis firent leurs adieux au calamar qui leur remit un souvenir pour grand-père Dingo. Ils reprirent le chemin des prairies, des montagnes et des forêts.

  A son arrivée, Dingo le jeune se précipita au chevet de son grand-père, ouvrit le grand coquillage irisé, l’aida à gober le mollusque et à boire les trois gouttes d’eau de mer.

  Grand-père Dingo remercia son petit-fils, lui fit un dernier sourire et rejoignit définitivement la prairie des dingos ailés.

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