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La comtesse me reçut dans son boudoir. La diplomatie semblait avoir gouverné le choix de chacune des petites choses qui s’y trouvaient. Un peu comme si le juste milieu devait rester par delà le mur, dans la salle à manger conventionnelle et guindée. L’entrée dans cette enclave revenait à braver les interdits. Chaque tableau, chaque bibelot, chaque ouvrage semblait avoir été abandonné volontairement à l’endroit où il se trouvait pour raconter l’Histoire qui s.y déroulerait. 
Je n’étais pas totalement naïf, non, beaucoup de bruits courraient et nombreux m’avaient précédés  en ce lieu.

On disait que la comtesse savait y faire.

Et je ne vous parle pas de sa très grande beauté qui eut suffi sans doute à tourner la tête du premier attaché parlementaire qui se présenterait au salon. Non je parle là, de sa finesse d’esprit supérieure qui lorsqu’elle vous parlait avait pour effet de vous rendre vulnérable et petit, et plus que tout…reconnaissant.  
Le ministre des finances, un ami de la première heure, m’avait bien mis en garde: «  à peine la porte fermée, tu ne seras plus l’homme influent que tu crois. Cette femme, en son boudoir, agira sur tes sens. Tiens toi prêt. Agis en conséquence, laisse toi bercer mais ne te laisse pas berner. Elle en a fait parler de plus coriaces que toi ! »

Sur le petit guéridon signé Gallet, se tenait trois ouvrages politico économiques surplombés d’un figaro madame ouvert sur le gros titre: « La fin du conte de fée du magna de l’industrie chimique ». En gros plan s’étalait la photo du comte et de la comtesse enlacés sous titré d’une ligne de mauvais goût  « chaque comte a une fin». On racontait que la comtesse avait fait de lui l’éminence grise du président, avant de tout lui confisquer:  son pouvoir, son capital et sa fierté.
Au milieu de la pièce, un sofa moderne et démesurément grand invitait à s’étendre. Ce qu’elle fit sans attendre. 
Un plaid à terre-  je le ramasse pour le lui donner- Il s’en échappe un bas de soie… joli cliché qu’elle ne manque de rehausser en rougissant quelque peu. La bibliothèque de noyer expose toutes sortes d’ouvrages d’art de culture et de littérature et de jolies photos la mettant en scène auprès des plus grands de ce monde. 

J’observe. Je suis petit. Je suis fier. Je suis là.
Elle me sert un cognac, elle se sert un whisky. 
Elle a vraiment un truc… Je suis fini.

Assis dans mon fauteuil à deux pas de cette femme, je devise sur le monde, sur la vie sur les choses. Ses mots sont percutants. Mes mots ont peu de sens. Elle me pose des questions, s’intéresse, me flatte. J’apprécie. Je suis un homme…

Une heure passe, peut-être deux ou bien trois. Je suis sur le sofa. Le plaid est doux et chaud et dans le creux de ses bras, je ne saurais trop vous dire ce que j’ai pu lui dire…

Au-dessus de la porte par laquelle je suis entré, je remarque la photo à contre jour d’une silhouette au palais. L’homme est de dos. Il regarde le jardin de l’Élysée. 
C’est étrange, je ne le reconnais pas… enfin, pas encore…

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