Thomas adorait son métier de prof et son plus grand plaisir était de sortir des murs de l’institution pour faire découvrir aux enfants le monde, sans bouquin ni vidéo, ce à quoi sa matière, l’histoire-géo, se prêtait à merveille. En cette sortie de fin d’année, il avait fait coup double en amenant ses élèves à Guérande, mixant l’histoire médiévale de la ville close avec la géographie économique liée à la récolte du sel. En bon cicerone, l’enseignant avait préalablement briefé sa troupe sur l’art et la manière de récolter l’or blanc de ce pays. La théorie ayant été abordée, le temps était alors venu de passer à la pratique en se rendant dans les célèbres marais salants.
Le groupe d’adolescents chemina donc à la queue leu leu sur le bord des étiers, en direction du paludier auprès de qui était le rendez-vous. L’homme prévoyant, rompu aux visites scolaires, avait disposé à proximité de lui l’ensemble des outils nécessaires au quotidien de son métier afin que les jeunes puissent les découvrir : le las, la lousse et le râteau à limu y côtoyaient l’incontournable brouette.
Le soir venu, bien loin de l’agacement qui le prenait parfois au retour de pareilles sorties à la lecture des âneries dont quelques petits cancres abreuvaient leurs copies, Thomas fut submergé d’une vague de souriante tendresse quand il lut sur le cahier d’un élève : « Le paludier est un cultivateur heureux qui vit au milieu des fleurs de sel et des œillets ».

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