Il m’a dépliée, m’a plaquée sur la table, puis s’est mis à parcourir mes chemins et croisements du bout des doigts. Il était attentif et présent, tout à moi-même.

Importante, admirée, utile et préservée. J’étais tout à la fois. 

Est arrivé l’instant, où il a ouvert le capuchon de son stylo à encre rouge pour entourer des lieux jalonnant mes sillons. Il y faisait des croix avec contentement, et moi j’étais  parée pour le mener au bout de son voyage. 

Quand il m’a raconté à sa fiancée, point par point, tous deux penchés sur moi, comme ils le seraient peut-être un jour sur un berceau… je me suis félicitée d’être le fil conducteur de leur destin prometteur.

Importante, observée, étudiée et annotée.

Repliée à la hâte, et du mauvais côté, je me suis retrouvée un jour sous le siège passager. Il faisait noir, et des papiers collants de biscuits entamés me salissaient le plan…  Ce jour là, j’ai compris.

Puis il m’a ressortie… je n’étais plus la même… Il s‘énervait sans cesse,  juste pour me déplier, à cheval sur le volant et camouflant la route. Il rabattait mes bords et criait sans arrêt, sa femme à ses côtés. 

Je ne sais s’il parlait  de moi ou de sa vieille voiture. Il prononçait ces mots: « Agaçante, peu pratique, sale et dépassée. »

Un chose est sûre , mon voyage touchait à sa fin et mon IGN  était à déplorer.
Il nous a remplacées.

Quand je suis nostalgique, je garde le souvenir de ses doigts sur mes sentiers. Et vous savez quoi?
Je suis sûre qu’il lui serait profitable de venir s’y perdre encore parfois, plutôt que d’écouter cette voix peu aimable qui lui donne le trajet le plus fiable et direct pour joindre le point B en partant du point A.

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