Comme d’autres je suis un mélange bizarre, née de rencontres improbables, mais génétiquement marquées. Chez moi nous ne parlons que français, et le mieux possible, pas question d’argot, de mot « bizarre », d’insultes. Il y avait un point d’honneur à trouver les mots pour s’adresser à l’autre, celui qui ne comprend pas, l’effort de trouver le chemin pour s’entendre avec douceur et patience, mais toujours en français !
Pourtant au-delà d’une langue unificatrice, il y a les autres. Celles qui ont fait le langage qui est le nôtre. Celles nées de nos lignées, qui parlent à l’intérieur de nous, qui résonnent dans la cage thoracique, dans le ventre, lorsque nous les entendons. Certains de mes ancêtres étaient en différence, ils me racontaient la langue qu’ils taisaient. Cette langue qui faisait d’eux des métèques, des barbares !
Les grecs puis les romains disaient barbares pour désigner tous ceux qui n’étaient pas eux, sans distinction. Un conglomérat de peuples qu’on ne savait nommer, qui ne parlaient pas comme eux, un inconnu, étranger, voyageur ou guerrier peu importait, ils ne les distinguaient pas. Nous en avons fait autre chose, un symbole de violence et de cruauté. Pourtant certains de nos grands-parents, ou de nos aïeux , étaient des barbares dans le sens premier du mot.
Nous sommes donc des barbares, puisque ni grec ni romain ! Nous sommes un peuple issu d’une multitude d’autres, petites tribus, conquérants, commerçants, marins, migrants… Dans nos arbres généalogiques nous trouverons tous un ancêtre étranger, ou plusieurs, peut-être tout un monde d’ailleurs.
Tout comme notre langue, celle de tous les jours, la langue dite vulgaire, ni littéraire, ni scientifique, et ce n’est pas du latin ! Une langue comme un peuple à l’étymologie variée, faite de mots de toutes origines et qui ne cesse de s’enrichir. Des mots comme des cailloux qui roulent sur le chemin, comme l’eau des ruisseaux qui clapote doucement, comme la mer qui s’alanguie ou qui fracasse les rochers, comme la neige qui bruisse sous les pas. Des mots qui sentent le mimosa, la garrigue, l’orange, le citron, les algues, le piment. Des mots qui sifflent comme le vent sur la lande, ou qui chantent dans les forêts. Des mots aux saveurs douces, épicées, fruitées, amères, qui racontent les cuisines et les ingrédients d’ailleurs. Des mots suaves comme des parfums. Des mots qui disent nos vies, nos envies, nos désirs, nos joies, nos peines, nos révoltes. Des mots coups de fouet, qui disent le mépris et l’arrogance .Des mots qui hurlent nos coups de sang, nos coups de gueules, nos coups de tête. Et puis les mots qui aiment, les mots coups de cœurs, ceux d’humanité, de tolérance, de respect, ceux gravés aux frontons des mairies.
Des mots qui naissent, vivent, se transforment, » s’entre-lettres ». Des mots qui sont le reflet de nos sociétés, de nos appartenances, de nos rapports à l’autre et au monde, de ce que l’on est, ou de ce que l’on veut être.
Alors oui! Nous sommes des barbares, nous parlons en langue vulgaire. Nous sommes plusieurs en un seul, nous portons en nous des patois, des langues étrangères, des langues mortes, des vocables anciens ou régionaux, des mots d’ici et d’ailleurs. Et nous en sommes fiers ! Notre langue est vivante, et ne cesse de s’enrichir. Ces mots multicolores d’ici et d’ailleurs, tricotent les pages blanches de nos écrits, et la musique de nos paroles, de nos chansons, de nos poèmes. . Et rien n’est impossible quand on s’aime, ou quand on sème ?
Et puis vous savez, Neandertal, les mots il s’en foutait peut-être ! Il les dessinait !
Des points et des virgules, des mots en bataille, des phrases chahuteuses, mais que les couleurs de vos lettres sont belles.
Merci
merci beaucoup
Bel éloge aux mots pluriels
merci
🥰
je présume que cela vous a plus ! je n’ai qu’un petit carré mais dix coeurs, alors merci
J’ai mis un smiley avec des cœurs, votre texte m’a beaucoup touchée.
merci