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Maman a dit : «  Cours ! Vite ! Fuis ! La cachette, cours ! ». Je cours comme elle m’a appris, pas en ligne droite. Changer de trajectoire, brusquement. Trouver la cachette, elle m’a montré, là sous le buisson.

« Cours, fuis, vite ! «. Alors j’ai couru. Ne pas regarder derrière, avancer, courir ! Sauter, bondir, non ! Maman a dit : «  raser le sol ». Courir jusqu’à l’abri. L’air me siffle aux oreilles. J’ai trouvé le grand houx, et le buisson de ronces, elles me griffent un peu. Juste à temps, je n’arrive plus à courir. J’ai trouvé la cachette, le trou que maman a creusé.  Je me suis glissé dedans, jusqu’au fond.

Mon cœur bat fort, trop fort ! J’ai le souffle court, je tremble. Mes yeux sont ouverts, grand ouvert, trop grand. Mes oreilles écoutent, je n’entends pas les oiseaux. Les sons me parviennent, ils sont forts, plus forts que d’habitude. J’ai l’impression que tous mes poils se hérissent, j’ai chaud, j’ai froid aussi. Je tremble.

Je n’entends plus maman. Va-t-elle me retrouver avant lui ? Et si c’est lui qui arrive avant ?…

Je me terre au fond du trou, le plus loin possible. Je sens la terre dans mon dos, elle est humide et froide. Est-ce assez profond ?

Je l’entends, il fouille les buissons, renifle le sol. Va-t-il me sentir ? Ou sentir ma peur ? Ne pas bouger, surtout ne pas bouger. Va-t-il entendre mon cœur ? Sais-t-il que je tremble ? Maman, où est maman ?

 Peut-on sentir la peur ? Son odeur passe-t ‘elle ? Est-elle plus forte que la nôtre, celle de d’habitude ? La terre, je me roule dedans, pour changer d’odeur, enfin je crois ? Est-ce qu’il m’a entendu ? Maman, où est maman ?

Et si maman était morte ? Si elle avait été tuée ? Non, ne pas penser à ça ! Il est là, juste à côté. Les branches bougent. Je vois une couleur brune, elle n’y était pas avant.  Je ferme les yeux. Oui, fermer les yeux, ne pas le voir approcher.  Je n’y arrive pas, pourquoi ? Est-ce que je dois regarder ? Le regarder ? Voir ma mort en face ? Doit-on toujours voir sa mort ? J’ai peur, je tremble, mon cœur bat fort,  toujours.

Un long sifflement, encore le sifflement. Il s’arrête, je ne l’entend plus, il ne bouge plus. Des bruits de pas sur le sol, les feuilles qui craquent. Toujours pas de chants d’oiseaux. Des voix, d’hommes, de femmes, ils sont plusieurs. Est-ce que j’ai encore une chance ? Ou est-ce que je n’en ai plus aucune? Des bruits, des voix. Ils s’éloignent, ou ils se taisent, je ne sais pas. Attendre !

Les voix s’éteignent. Je n’entends presque plus les pas, ni le chien. Je relève la tête, un peu. Si j’avançais, un peu, un tout petit peu, pour regarder ? Non, je reste encore au fond, maman a dit : » attends les oiseaux ». Mon cœur est en train de se calmer, mon souffle est plus long. Attendre, encore !

Avancer, un  peu, un tout petit peu, je ne sens rien, je n’entends rien. Les oiseaux, attendre les oiseaux. Encore un pas ou deux. J’arrive juste à l’entrée du trou. Les oiseaux chantent, c’est bon signe, tout à l’heure je ne les entendais pas.

Passer les ronces, doucement, faire attention, me laisser la possibilité de reculer. Maman, où est Maman ? Je sors, il n’y a plus rien, plus personne, je suis seul. Revenir sur mes pas, ou rester ici ? Réfléchir. Maman, où est maman? J’ai peur, encore !

Le sol vibre, je le sens. Une toute petite vibration. Je la reconnais. Il faut que je réponde. Je tape de la patte arrière, comme maman m’a appris.

Rester où je suis, elle va venir. Attendre.

 Elle est là ! Je me blottis contre elle, je suis bien, j’ai chaud, je la respire. Elle me donne de petits coups de  tête, me rassure. Nous retournons au terrier par les plaines de trèfle et les doux champs de fèves.

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