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Tel Rimbaud à sept ans, Gabin faisait des romans sur la vie, une vie d’aventure qu’il rêvait, perché dans le grenier, auprès de la belle lucarne en encorbellement qui parait le toit. De là-haut, il lui semblait que le quotidien décevant de son enfance cabossée ne pouvait l’atteindre ; de là-haut, il touchait le ciel et les étoiles, dans une ataraxie qu’il n’aurait su nommer, et y écrivait son futur en piochant dans les fabuleuses histoires découvertes sur les étagères poussiéreuses de son repaire. Lire était sa passion, son voyage au long cours ; huit ans dans quelques jours, une incroyable précocité intellectuelle, et la rencontre de l’écriture grâce à la cuisinière du domaine qui, telle une marraine-bonne fée, lui avait donné, dès ses quatre ans, les clés du savoir et ainsi permis la découverte de ces vies de papier qui illuminaient ses journées.

Deux amis précieux, dictionnaires aux couvertures fatiguées, un peu usées et ridées, trônaient en bonne place dans son univers secret ; il faisait appel à eux, Merlin et Dumbledore, comme à des vieux sages, pour comprendre certains mots étranges qui peuplaient ses lectures. Aujourd’hui, alors que le monde du rez-de-chaussée se réjouissait du long week-end de mai propice à faire le pont, Gabin s’était donné pour objectif de trouver les bonnes armes pour terrasser son ennemi, un dénommé Jimmy, voisin de neuf ans, fort de trente centimètres et de dix kilos de plus que lui. Non pas un pur esprit mais un pur connard, comme disait son grand-père à propos de gens qui passaient à la télé. « Tirer sur une pierre c’est perdre ses flèches » avait-il appris avec l’un de ses héros préférés, alors il s’employait à muscler son cerveau, en attendant que les années lui donnent un corps apte à se battre en duel avec quelque chance de réussite.

Enfouie sous un monceau de couvertures bariolées et trouées, une vieille valise bordeaux au cuir terni lui sembla la promesse d’une excellente pêche. Quand la serrure un peu piquée accepta de manœuvrer, Gabin tressaillit, et plus encore quand il découvrit le titre de l’ouvrage qui y dormait : « Le livre dont tu es le héros ».

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