Le maestro du grand paquebot de croisière n’était plus de toute jeunesse mais ne détestait pas pour autant les frivoles histoires de fesses.

Son portefeuille bien garni lui permettait encore sans souci d’attirer de jolis minois dans son lit.

Cette fois, c’est Armande, sa maîtresse du moment, qui avait su le persuader de l’embarquer avec lui pour la longue traversée sans qu’elle n’ait à bourse délier.

Ce qu’il ignorait pourtant, c’est que la belle avait un autre amant, Constant.

“Sois du voyage, ce sera tout à notre avantage”, avait-elle dit à ce dandy volage avant d’ajouter: “mais motus et bouche cousue, nos ébats défendus ne doivent pas être connus”.

“Parfait, sois sans crainte, je me fondrai sans difficulté dans la foule des passagers”, lui avait-il répondu.

Ainsi, tous les soirs, depuis le début de cette histoire, dans le grand restaurant rutilant, l’homme à la baguette dirigeait son orchestre plein de talent sans seulement se douter des caresses complices qui se tramaient en coulisse.

Tournant le dos à l’assistance après le rituel salut de circonstance, il ignorait qu’aussitôt Armande s’ecclipsait pour ne réapparaître que deux heures après, juste avant que les musiciens ne cessent de jouer.

Hors, lors du dernier banquet, il s’aperçut soudain, après moultes pièces pleines d’entrain, qu’il avait oublié en cabine la partition du final, qui n’était pas banal.

S’excusant auprès des convives attablés et déjà rassasiés et enivrés, il s’en fut en courant à travers couloirs et escaliers vers la chambre 96 qu’avec sa douce il partageait.

Sans même avoir à introduire la clef, il se retrouva nez-à-nez, totalement éberlué, avec un beau gosse blond souriant, en pure tenue d’Adam.

“Excusez-moi”, lui fit-il, “J’ai dû me tromper de numéro, c’est renversant, quelle cabine est donc la vôtre si ce n’est pas la nôtre?”.

“C’est la 69!”, répliqua le gars en croisant les bras.

Notre homme s’éloigna donc en grommelant entre ses dents: “J’ai une sensation d’être le dindon de la farce, il va falloir que je m’explique avec cette garce!”.

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