Stratégie
La Présidente de la Cour d’Appel prononça le verdict d’une voix qui semblait dire « je suis désolée”. Le condamné, regardant ses pieds, ne montra aucune réaction. Le fatalisme ambiant donnait à la scène des accents cornéliens. La Présidente semblait n’avoir eu d’autre choix que d’appliquer la loi implacable pour cet homme. Cependant, on pouvait percevoir comme une sorte d’osmose entre ces deux êtres, l’une annonçant une sentence à demi mot et l’autre dans l’acceptation passive du verdict. On sentait une timide communion de pensée, une intimité non avouée qui mettait mal à l’aise la Cour.
L’homme, calme, releva la tête, lentement, et leurs regards se croisèrent un long instant.
La peine était sévère : deux ans d’incarcération pour vol de voiture, défaut de permis et situation irrégulière sur le territoire.
L’homme quitta la salle en se tournant vers elle.
Quelques jours plus tard.
Le personnel de la Santé est en effervescence. Une Présidente de la Cour d’Appel rend visite à un détenu. Un parloir spécial leur a été aménagé, sans témoin, eu égard à la personnalité de cette femme. L’homme arrive, souriant, dans une tenue impeccable. Ils ont gagné la première partie du plan soigneusement mis au point, dont le vol de voiture était le premier élément. Il ne sera pas renvoyé dans l’immédiat au Costa Rica où ils se sont aimés il y a quelques années. Il reste deux années à la Présidente pour jouer de sa notoriété et lui obtenir des papiers en règle…