VIOLETTE 3 @payette

Une histoire de violette -3 – violette

J’étais toute fraîche du matin, j’avais étalée ma corolle par cette belle journée. J’avais sentie quelque chose me démanger, il me fallait être là. Et il est arrivé. Il a garé sa voiture, j’étais au niveau de son coffre quand  il l’a ouvert. J’ai vu son air dépité, les roses toutes tristes. On n’a pas idée des roses dans un coffre de voiture, c’est certain aucune de nous ne tient bien longtemps, et sans eau.  Il les regardait l’air de plus en plus triste. Alors je me suis faite toute pimpante, j’ai ravivé mes couleurs au maximum d’intensité, mon petit cœur jaune et blanc tout brillant, j’ai demandé aux feuilles de faire un effort et de briller un peu plus. Il fallait qu’il me voie. J’ai senti que c’était important, que c’était un grand jour pour lui.

Il a d’abord pris la bouteille et les gâteaux, et est reparti dans la maison. Il s’est passé un moment, les feuilles n’arrêtaient pas de rouspéter qu’elles en avaient assez d’être toutes droites et brillantes, qu’elles avaient sommeille, qu’il faisait chaud, et je disais «  tenez bon les filles, tenez bon, c’est important.

Il est revenu, a de nouveau ouvert le coffre, regardé les roses sous toutes les coutures. Pas une de correcte. Et puis c’est là qu’il m’a vu. Il m’a remarquée enfin. Il s’est baissé, a hésité un peu, et puis délicatement, il m’a cueilli. Il m’a posé sur un écrin, puis a réfléchi et m’a glissé dedans.

Je n’ai pas vu toute la suite, mais j’ai entendu parler. Il a ouvert la boîte, elle était devant moi, elle souriant et pleurait. Elle m’a prise tout doucement,  ma posée sur un morceau de serviette toute douce.  Je n’ai pas tout suivi car j’ai fermé les yeux. Ils avaient quand même droit à un peu d’intimité, et puis j’ai de l’éducation, j’ai beau n’être qu’une simple violette je prédispose à l’amour, je serais même magique !

Je l’ai entendu dire, j’avais prévu des roses, mais elles ont fané, elle lui a répondu que j’étais la plus belle des fleurs qu’il aurait pu lui offrir. J’en étais toute émue. Elle m’a mise entre deux feuilles de papier, bien étendue, je croyais que c’était pour que je me repose un peu.

Quelques jours plus tard, alors que j’étais toute desséchée, elle est venue me reprendre et m’a mise dans un joli cadre, qu’elle a accroché à côté de son lit, sur la carte où elle m’a fixée il y avait une date, celle du jour de sa demande en mariage.

Parfois ils se sont disputés, mais je ne sais pas pourquoi, lorsqu’ils me voient, ils posent la main sur mon cadre, et tout redevient calme.

Depuis ce jour tous les ans, il lui cueille une violette, le même jour. Elle a un carnet, elles y sont toutes. Cela fait vingt ans maintenant. Alors si quelqu’un ose me dire qu’une violette n’est pas une fleur de l’amour, je ne sais pas ce que je lui ferais, en tout cas ce ne sera pas dans cette maison.