Voir, plus loin, toujours plus loin, aux confins des mondes, à des années –lumière. Découvrir, nommer, cartographier, s’approprier. Dans la nuit étoilée, la fenêtre s’ouvre, doucement, laissant apparaître une tranche de ciel parsemé d’étoiles. Petits points lumineux, petits éclats d’or brillants dans le bleu-noir. Celles que l’on voit, ils les connaissent déjà, et ne les regardent presque plus. Moi je les vois encore, à chaque fois c’est la magie qui opère, je suis ému. Théoriquement je n’ai pas à avoir d’émotions, de sentiments, je ne suis qu’un télescope. Pourtant comment être de marbre face à cette immensité ? Cette beauté… J’embrasse ce morceau de ciel avec une joie indicible. C’est le printemps presque l’été, le ciel est pur, pas de nuages. J’ai de la chance, ici je suis au milieu de nulle part, pas de ville, pas d’habitation, donc pas de pollution lumineuse.
Ils sont en train de me régler. Ils recherchent une comète je crois. J’en profite pour faire le tour de mes connaissances. Elles sont là toujours aussi belles. Les géantes gazeuses avec leurs bandes nuageuses, les géantes de glace bleu-azur, les géantes rouges, planètes, galaxies, toutes flottant dans l’atmosphère infini.
Et les hommes regardent, à la fois admiratifs et blasés. Ils n’ont pas le temps de s’attarder, ils cherchent. Aller toujours plus loin, comprendre ce qui a fait leur monde, s’il y en d’autres, et s’ils sont comme le leur. Jusque-là ils n’ont rien trouvé, du moins pas encore. Les distances avec moi s’amenuisent, je vois à des années-lumière. Une beauté qui s’étale dans l’Ether, tournoie, pulse, vie, explose, meurt.
Pas de trace de vie, d’humanité ! Est-ce un bien ou un mal ? Est-ce que le Créateur, s’il y en un, après avoir vu les hommes agirent, a dit stop, j’arrête les dégâts ! Possible !
Tiens, c’est dommage, ils ne donnent plus de nom aux planètes, ou aux galaxies, juste des numéros. Ils n’ont peut-être pas assez d’imagination ! Pourtant s’appeler Cérès, Makémaké, c’est joli, cela fait partie de la poésie interstellaire. Ils n’ont peut-être pas assez de dieux, déesses, ou autres divinités pour cela, l’univers est grand et très habité, si je puis dire, et les hommes pas si nombreux que cela en comparaison. Mais Osiris c’est quand même plus beau que HD209458b ! En fait les numéros, c’est pratique, tout le monde s’y retrouve, adieu l’imaginaire ! Et pourtant, si je vous dis Altaïr, Deneb, Proxima du Centaure, Eridan, vous partez déjà en voyage !
Je dois être un peu fleur bleue. Mais ce n’est pas ce que l’on me demande ! Tous les soirs j’attends que l’on ouvre la fenêtre d’observation. Je ne me lasse pas de contempler l’univers. C’est tellement beau. C’est un bon job, finalement ! Le seul truc, c’est qu’ils ne me laissent pas regarder où je veux mais où ils veulent ! J’aimerais bien, juste une fois, regarder où je veux, au hasard. Remarquez il y aurait un risque, enfin plusieurs. D’abord je ne saurais pas où regarder, ensuite je vais m’éparpiller un coup d’un côté, un coup de l’autre, plus de temps à droite, moins à gauche, enfin je ne suis pas certain de pouvoir m’arrêter.
Et si je tombais amoureux ! Non je laisse cela aux astrophysiciens, c’est plus prudent !
J’ai bien aimé le “c’est un bon job”, ça donne envie de lui dire de discuter avec son boss pour se faire accorder des libertés 🙂
Il risque de tomber amoureux d’une planète ou de la galaxie toute entière
Très beau texte qui nous emporte dans une dimension onirique et intergalactique.
merci beaucoup