– Pousse- toi, pousse toi!  Je dois pouvoir filer entre les mailles!

le petit anchois jouait des nageoires et frétillait de la queue , l’oeil vif  et l’écaille légère. Il offrait aux soleil sa couleur nacrée à chaque soubresaut et son combat pour atteindre la sortie relevait de l’acharnement.

La seiche, l’oeil torve et la peau mate étonnamment terreuse pour un être marin le fixait résignée. 

– Dis-donc  petit, un peu de respect… pas la peine de t’agiter ainsi. Tu n’es pas à l’ordre du jour, fais moi confiance. Je te parie mes dix bras qu’aujourd’hui, c’est mon heure, et pas celle d’un anchois, surtout seul, comme toi!

– Si seulement c’était vrai! Tu es vieux, moche et peu goûteux! Tu les as entendu en remontant le filet, ils ont dit « whaou, quelle belle prise! » . Ne le prends pas mal, tes nombreuses qualités ont fait couler de l’encre… mais tu restes bien laid!

– ouh là… comme tu y vas! je ne parle pas l’humain et les cris d’acclamation ne me sont familiers . Mais ce que je sais, c’est que ta nervosité gâte ma tendreté! S’il est une chose que je refuse, c’est bien d’être gâché, petit! 
Et sache pour ta gouverne, qu’une fois bien cuisinée, j’ai la chair nacrée! Ma beauté est cachée , mais elle est appréciée.

D’ailleurs, on me l’a dit, je suis le plat du jour de ce midi! 

Dans un geste précis et presque souple le céphalopode propulsa le poisson à travers les mailles, en le mettant en garde une dernière fois!. 

– retourne dans la grande friteuse iodée petit gars, de toute façon,  il n’y a pas d’anchois dans la paella! 
A tout plat, tout honneur.. et à chacun son heure!

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