Le rêve, le désir et l’ambition avaient été de bons moteurs ; il n’éprouvait aucun regret. « C’est juste que l’on change, pensait-il…
Mais sous les regards incrédules de ses proches, il comprenait qu’un simple « c’est juste que l’on change.. » ne suffirait pas à justifier son choix.
La place qu’il occupait dans ce monde, dans son monde, et surtout dans celui des autres allait être vacante, tout au moins quelque temps. En changeant, il les poussait donc également au changement. Tous n’étaient pas prêts à modifier leur sphère familière. Pas sans une bonne vraie raison valable!
Et pourtant…
On peut s’autoriser à changer, n’est-ce pas?
Ne pas se trahir soi-même ne signifie pas de rester le même. Ne pas oublier d’où l’on vient n’induit pas de rester sur place. Etre ambitieux ne force pas l’adversité. Rien n’est écrit. Tout est page à écrire, raturer, corriger… compléter.
Les quatre paires d’yeux autour de la table attendaient ses explications. Il se faisait l’effet d’un lâche qui aurait fomenté un coup bas en annonçant sa décision de cesser sa brillante activité professionnelle, pour vivre une nouvelle vie paisible en Ardèche sans autre but que d’exister au monde. Il eut été plus loyal aux yeux de tous que son choix n’en soit pas un, voire qu’un incident de la vie le contraigne…car alors, on ne lui en aurait pas fait ombrage, mais là…
Il ne voyagerait plus autant. Il ne sortirait plus chaque week-end et sans doute allait-il significativement réduire son carnet mondain et les opportunités qu’il représentait, mais c’était son choix. Il aimait ce choix restrictif et absolu.
Lui qui pensait avoir fait le plus difficile en décidant de changer de vie, prenait à cet instant, conscience que le plus dur serait de faire face à l’inertie de l’autre.
Changer n’était donc pas une affaire personnelle.
Texte puissant sans être jamais dogmatique. Il m’a fait penser à “L’insoutenable légèreté de l’être” (Kundera)… (C’est très, très loin ; je ne saurais expliquer spontanément cette relation, mais je mettrais ma main au feu qu’elle doit avoir quelque pertinence…)
Merci, en tout cas, pour cette réminiscence agréable.
(Guillaume)
Une excellente suite donnée à cet incipit et donnant lieu à une intéressante réflexion sur le changement de vie.
Ce n’est pas toujours facile de tout quitter, mais nous sommes tellement heureux après dans notre nouvelle vie. J’aime beaucoup ! 😀
Le battement d’aile d’un papillon et la théorie du chaos…
Même une pensée fait changer les choses, alors une décision !!
En quelques lignes, le ressenti de la difficulté à faire aboutir un tel processus est vraiment bien exprimé.