Comme Ronsard @Angelune

Il haussa les épaules et grimaça. Il ne serait jamais poète. Il prit son manteau et sortit. Dehors, la vraie vie l’attendait loin de ces faux amis uniquement motivés par la perspective d’approcher par lui le P.D.G. de la plus grosse boîte de la métropole. Son père, parlons-en, ce n’est pas auprès de lui qu’il trouverait un encouragement à écrire, surtout des poèmes ! tout ce qui l’intéressait c’était la lecture de son bilan financier, beaucoup de chiffres, très peu de lettres, ça pourrait être sa devise. A cette idée, un léger sourire éclaira très brièvement son visage, vite balayé par de nouvelles ombres échappées de son esprit tourmenté. Sans s’en rendre compte il avait pris la direction du parc floral à grandes enjambées nerveuses. Traverser la roseraie en ce mois de juin était toujours un enchantement pour les yeux et un régal par les odeurs suaves et sucrées que l’endroit exhalait. Son lieu préféré était un belvédère sur le point le plus haut des jardins d’où l’on embrassait par le regard l’intégralité des rotondes fleuries et qui donnait à voir en arrière-plan la plus belle rivière de France. Le parc était peu fréquenté à cette heure matinale malgré le beau temps et cela lui promettait une solitude bienvenue. L’escalier en colimaçon qui montait à la plateforme croulait sous une cascade de petites roses rouges. Il s’y glissa tout en faisant attention à ne pas érafler ses vêtements sur les très nombreuses épines de ces buissons. Avant même d’y arriver il savourait le confort du lieu équipé d’un banc en demi-cercle et d’une table ronde de pierre polie, il y avait ses habitudes. C’est pourquoi il se figea en découvrant que son refuge était déjà occupé. Une jeune femme penchée sur un carnet écrivait et tout à sa concentration elle ne l’avait pas entendu arriver. Percevant une présence elle leva alors la tête, posa des yeux pervenche sur le jeune homme et lui offrit spontanément un sourire ensoleillé. La plus belle fleur du jardin l’attendait, il pouvait enfin naître à la poésie !