Ce jeune est un brave garçon, je l’ai rencontré l’an dernier alors qu’il sortait de chez le barbier d’un air complètement dépité. C’était sa première fois. Il voulait être un homme. Quoi de plus viril que de se faire raser par un ferme et solide blaireau, dans un salon à l’ancienne ? Son poil encore duveteux avait aboli ses rêves. Poussé vers la sortie par un professionnel aveugle qui n’avait rien compris, il s’était résigné : trop grand pour aller jouer, trop jeune pour aller charmer. Ce touche-à-tout ne cessait pourtant de vouloir expérimenter. Assoiffé d’exister. Cet entre-deux s’éternisait et le désespérait. Se sentir invisible l’anéantissait. Il aspirait plus que tout à devenir adulte pour être libre de ses choix, découvrir l’univers, séduire et se sentir beau, crier sa flamme, éprouver ses idéaux.

Ses parents, craintifs, protégeaient leur gamin comme un trésor caché. Aller vers le monde était trop risqué. « Ne touche qu’avec les yeux ! », criaient-ils chaque matin, leurs peurs brisant la joie de ce fils chéri. Avec de simples mots, on éteint la vie : la rivière s’assèche et l’herbe se ternit. L’Amour s’il n’est lumière n’élève pas l’enfant qui grandit.

Quand je l’ai cueilli ce jour-là devant cette vitrine, larme à son œil et le cœur en lambeau, j’ai pris le temps des mots et je lui ai souri. Espoirs et rêves arriment à la vie. Les nourrir à tout prix est une source infinie d’énergie : le cœur battant il a pris son élan, et hop !

Il a ri, joyeux, et solide comme un roc, il a bravé le vent.

(contraintes : en gras et en italique)

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