Un rayon zébrait le ciel  mais la houle accentuait la difficulté à distinguer la côte. Après  de longues heures de nage, à se demander s’il s’agissait d’un leurre ou bien d’un phare,  le requin pèlerin traînait ses guêtres en surface.

Parti sur un coup de tête, malgré la désapprobation des siens, Il hésitait à présent, à faire demi tour. 

Et si finalement son aïeul avait raison… si l’homme chassait le squale pour sa viande et son foie…   

A bien y penser, le jeune mammifère n’en menait pas large et sa petite escapade avait du plomb dans l’aile.  D’autant plus, que les mouettes rieuses avaient pris les paris, pour savoir quelle soupe les ailerons du requin allaient agrémenter.

Après tout, au bout de ce paysage d’écume, le gardien du phare n’est peut-être qu’un pêcheur à la lanterne cherchant à l’attirer  comme un vulgaire gardon.
Et lui, un stupide pèlerin, adepte du « longe côte », qui s’apprête à se jeter droit dans les filets. 

L’eau était bonne et poissonneuse. A quoi bon chercher mieux. La virée allait s’achever là, à quelques miles du phares. Notre jeune pèlerin se sentait sage, aussi jeune et aussi requin, soit-il. Comme il se dit chez les humains: les voyages forment la jeunesse…

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