Texte satellite du feuilleton de @melanie : “Les voix du vin sont impénétrables”
Ah ! ils ont l’air fin, écroulés dans les vieux fauteuils de la sacristie, délivrant une symphonie de ronflements désaccordée. Je me demande si on peut les entendre depuis la nef…
J’ai connu des ivresses de toutes sortes dans mon existence, issues de breuvages aux diverses couleurs qui s’accordaient toujours très bien avec ma robe dorée légèrement transparente, très sexy direz-vous peut-être. Entendons-nous bien, l’ivresse était le fait de ceux qui avaient bu, pas la mienne. Je n’étais qu’un relais, un facilitateur sans doute, mais je réfute toute responsabilité quant à l’usage excessif de la boisson.
Mon rôle, c’est de sublimer le vin, lui permettre de s’aérer, de prendre un peu l’air mais sans se dénaturer, juste respirer pour s’épanouir. J’ai toujours rempli ma mission avec une grande conscience professionnelle et je n’ai pas à rougir de ces longues années sur la table d’une des plus riches familles de la ville. Ils savaient apprécier les bonnes choses et se régaler de bons crus dont les senteurs fruitées et boisées me parfumaient, j’en rêve encore…
Un accident de la vie m’a valu ma mise au ban, un éclat presque imperceptible, mais qui n’a pas échappé à l’œil perçant de la maîtresse de maison. C’est comme ça que je suis tombée en carafe, c’est dingue cette expression, vous ne trouvez pas ? Alors, à la kermesse en juin, j’ai connu la honte de poireauter sur le stand de la paroisse et encore plus d’être boudée par les chalands. C’est comme ça que je me suis retrouvée reléguée à la sacristie, le bedeau m’ayant pris en pitié. En fait, il avait du mal à remplir les burettes à partir du bidon où il stockait le bon cru dégotté chez son employeur-vigneron ; il a trouvé pratique d’avoir un nouveau contenant pour jouer les intermédiaires. Je suis moins exposée mais toujours utile et j’avoue qu’il a trouvé là un vin de messe d’exception. Belle robe, jolie rondeur et nez persistant. Les anges auront du mal à avoir leur part, le breuvage ne traîne pas dans les verres !
Je suis moi-même amateur de bons crus et je me rappelle une tournée dans les grandes caves de Bourgogne.
La tonalité générale de votre texte s’accorde parfaitement à l’esprit raffiné qu’on attend d’Algorare . J’aime aussi user de ces termes qui se bonifient , car ils sont peu employés dans leur sens exact (un chaland).
Je n’ai pas bien compris pourquoi on vous a boudée, surtout si vous aviez votre robe dorée transparente très sexy (çà, j’en suis sûr).
Je vous quitte pour rêver un peu.
Graloup
Merci d’avoir compris !
Une carafe vivante. Super.
Moi, je reste un peu en carafe. Il y a bien encore quelques bonnes dames chapeautées qui attendent. Je vais peut-être aller de ce côté-là…
Bien vu l’algobjet qui s’insère dans la saga ! Bravo!