Bingo ! Il venait d’inventer la méthode absolue pour écrivaillon en panne. A coup sûr elle lui vaudrait la plume d’or au Concours Lépine de littérature. Bientôt la gloire, peut-être même la richesse. La méthode, d’une simplicité déconcertante, reposait sur trois principes : Mélanger, Infuser, Extraire. Dit comme ça, on pourrait penser à une recette pour concocter une boisson alcoolisée à base de plantes comme celles dont les moines étaient devenus spécialistes mondiaux. D’ailleurs il n’y avait pas encore pensé mais, peut-être un petit verre pourrait constituer une sorte de catalyseur à son processus, c’était une éventualité à tester prochainement. Dans une démarche scientifique rigoureuse et en cobaye consciencieux, pour valider avant publication cette avancée phénoménale dans l’art littéraire, il lança l’opération en prenant comme matériau de base la fantastique mine d’or que constituait l’AlgoScriptor. Il lut donc l’intégralité des sujets du jour en prenant son temps, en pesant chaque mot, chaque proverbe, citation ou incipit. Puis éteignant l’ordinateur, mais gardant à portée de main, outre ses lunettes, un crayon et un bloc note, il s’allongea confortablement sur le vieux canapé échoué dans son bureau. Fermant les yeux il attendit que le Mélange commence à Infuser. Les deux premières minutes, les mots tournèrent lentement dans son esprit, produisant une sorte de maelström verbeux, puis le phénomène s’accéléra, la magie était en route se dit-il ! C’est alors qu’une sorte de vertige le prit, il avait la sensation d’habiter un tambour de machine à laver pendant l’essorage, sensation purement intellectuelle, il va sans dire. Le but du jeu était que la machine à laver en question opère une mutation et se transforme en machine de tirage du loto. L’Extraction de quelques éléments bien sentis avec l’histoire qui les lierait, constituait alors le tirage gagnant. Y avait-il trop d’éléments dans ce crâne pourtant super bien calibré ? Beaucoup d’images s’y entrechoquaient mais surtout celle d’un chaudron en pleine ébullition, le rendant un peu nauséeux. Heureusement et il en était fier, il avait pensé à la sécurité, c’était élémentaire dans son métier. Alors conscient qu’il ne maitriserait bientôt plus rien et afin de ne pas abîmer irrémédiablement un esprit si précieux, il enclencha le bouton d’arrêt d’urgence. L’escrivatouilleur s’endormit.

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