Désobéissance

J’ai décidé de déroger à la règle. J’entends traiter ce sujet, hors sujet, hors consentement. Un petit plaisir que je me fais qui me rappellera ma jeunesse, cette gamine révoltée qui n’en faisait qu’à sa tête, ce qui lui valait de temps en temps (souvent ?) un zéro en composition française, assorti d’un commentaire sanguinolent griffonné nerveusement, sur la table de la cuisine, par un professeur exaspéré par tant de platitude, tandis qu’elle donnait le goûter à ses enfants qui s’étaient écrié “maman, on a faim” avant même qu’elle ne posât son sac sur la commode de l’entrée, héritage de sa grand’mère adorée.

Proverbe du jour à traiter :
En attendant les souliers d’un mort, on marche longtemps pieds nus“.
Je garde mes pieds nus et je n’ai nul besoin des souliers, sans doute démodés et usés par le frottement que font, de la cuisine au lit, les pas hésitants d’une personne qui s’approche lentement du trépas.

Pour ne pas perturber mes semblables, il m’est indispensable de soigner mes pieds. Ils méritent le respect. Les négliger serait inconvenant. Cette discipline demande une attention toute particulière et une rigueur que je pourrai atteindre (ou pas) à force d’efforts semés de doutes, d’embûches et de blessures.

Un pied nu, dans sa solitude, est bien inutile. Pas à pas, il me faudra le dompter, le familiariser, le guider dans la démarche souhaitée, lui accorder la présence d’un autre pied, semblable mais différent dans sa structure et la sonorité qu’il produit. Tous deux pourront alors se croiser, s’imbriquer et donner le rythme en partant à la conquête d’autres pieds dans un ensemble mélodieux qui œuvrera en totale autonomie sans même mon intervention. Ils s’assembleront en mots, et les mots en rimes. Qui les lira ?

Il ne me reste plus qu’à apposer ma signature et ranger mon stylo.

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