Notre première fois, c’était magique ! Sa main tremblante m’avait reçue comme on cueille un oiseau blessé, tendrement, précautionneusement. Il me regardait un peu incertain, se demandant s’il devait y croire, si le rêve ébauché pouvait prendre chair dans le temps, sans faiblir, sans connaitre le sort funeste d’autres histoires qu’il hésitait à se remémorer. Il m’a mis dans sa poche et sa main a gardé le contact avec moi, sans doute craignait-il que je disparaisse comme un objet magique soumis à un maudit sortilège. J’ai gouté cette proximité, je ne l’ai plus quitté et nous avons commencé une belle histoire faite de rendez-vous amoureux, de nuits torrides et de petits déjeuners délicieux.
Deux ans ont passé, il a toujours eu deux jeux de clés dans sa poche, je n’étais pas jalouse. D’un commun accord, ou bien peut-être sans chercher ce sur quoi ils pourraient s’accorder, par paresse ou par peur, ils avaient choisi ce compromis, tour à tour chacun chez soi ou tous deux chez l’autre, au gré des envies et des circonstances. L’affaire avait un parfum un peu bohème, une saveur d’indépendance revendiquée, un goût d’incertitude qui pimentait leur désir.
J’aurais adoré vivre ainsi l’éternité. Mais hier matin, il a quitté l’appartement et m’a laissée pantelante sur la porte côté intérieur. Avant de m’abandonner il m’a regardée, a soupiré, m’a caressée une dernière fois et se retournant a claqué la porte et a dévalé l’escalier comme on fuit un incendie. Il était déjà dehors que j’en tremblais encore.
savoureux …
Il y a une exploration sensorielle (autour du toucher) que j’ai tout particulièrement apprécié : “la main tremblante” “sa main a gardé le contact”, “cette proximité, “m’a caressée”, j’en tremblais”