Ce jour-là Pierre était malade. Enfin c’est plutôt qu’il n’avait pas dessaoulé.Le rouge au front, l’haleine fétide, il m’avait demandé d’aller l’excuser en prétextant une panne de téléphone. C’est ainsi que je rencontrai Xavier.
Grand escogriffe dans un bleu de travail trop court, les mains dans les poches, il m’annonça que le patron était resté près de sa femme souffrante mais qu’il lui ferait la commission. Et il ajouta, baissant la tête “Mais il le sait bien…”
Fuyant mon regard, il refusa de répondre à ma surprise “Non, non je lui dirai, c’est d’accord, c’est d’accord, quand il viendra…”
La gêne de Xavier me laissa perplexe.
De retour à la maison, je trouvai Pierre allongé sur le canapé, somnolant devant la télé.
“Xavier a dit que le patron savait bien que tu serais fatigué aujourd’hui”
Un courant électrique le souleva , il s’assit mains sur les genoux, cou tendu, les yeux exorbités. Me fixant durement, souffle court, il balbutia “Il a dit ça Xavier ?”
“Bin oui il a dit ça…”
“Juste ça, comme ça” murmura-t-il.
“Oui, juste comme ça, pourquoi ?”
Le regard perdu dans le vide, Pierre resta ainsi de longues minutes bouche bée et j’aperçus un léger tremblement de ses mains.
C’est alors que me revinrent ses mots la veille au soir quand, ivre mort, il avait poussé la porte un sourire niais sur le visage pour ânonner:
“Elle boit trop la garce, elle boit trop quand même”
Lecture agréable. Belle chute ! C’est ma soirée de distribution de dizaines de coeurs.
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