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Santa-brings-guns-to-child - https://algomuse.fr/membres/athena/
AlgoZimage du 17 nov. 2023
« Ça me rappelle que j’ai pas encore acheté mon cadeau secret Santa… », pensa le responsable de la sécurité du centre commercial. Il devait trouver un cadeau à moins de 10€ pour un membre de l’équipe hygiène. Il ne savait vraiment pas quoi…Il s’étonnait de penser à ça maintenant. La scène devant lui était surréaliste. Deux policiers encadraient un Père Noël et l’escortaient, menotté, vers la sortie.
« Non, le Père Noël n’est pas une ordure », pensa Sam en sortant manu militari du centre.
Père Noël occasionnel embauché par le centre commercial comme saisonnier, mais pas comme intérimaire ou CDD, il ne percevait ainsi même pas les 10% précarité. D’ailleurs, vu la situation, toucherait-il au moins ses heures travaillées…
Et pourtant la journée avait commencé normalement. Dans son costume bon marché, un rien étriqué, qui sentait le synthétique (et la sueur assez vite), Sam souriait, réceptionnait les lettres au Père Noël qu’il mettait dans une grande boîte marquée « Santa, Laponie » en songeant que Santa, c’était ridicule et qu’on était pas aux States. Il donnait aussi les cadeaux gagnés par les clients aux différents tirages au sort des boutiques du centre. Et du centre lui-même. Il y avait un smartphone onéreux, quelques enceintes bluetooth et casques audio de qualité, mis là où il pouvait les surveiller. Le vigile du centre rôdaient non loin. Et un robot de cuisine, quelques lisseurs pour cheveux et des bons cadeaux intéressants. Mais la plupart des cadeaux étaient des chocolats moyenne gamme et des biscuits, ou des babioles non recyclables et qui finiraient en déchèterie.
Sam ne voulait pas se laisser déprimer par tout ça aujourd’hui. Il songea quand même à son propre smartphone, à l’abri dans sa veste de costume, et au casque audio qu’il avait pu s’offrir quelques années auparavant. Quand il avait encore un statut. « Arrête de penser comme ça », s’ordonna-t-il.
Il fut d’abord troublé par un curieux manège. Un type à la mine peu amène le regardait de côté, il semblait s’éloigner de l’étalage des cadeaux. Merde…Sam jeta un oeil au vigile, il était occupé avec quelqu’un dont le sac faisait sonner les portiques de Nature et Découvertes. Le type louche s’était éloigné et Sam compta les paquets précieux (notés d’une étiquette rouge) sur son stand. Non, ils étaient tous là. Mais il était sûr que le type avait fait quelque chose.
Quand le vigile fut disponible, Sam lui fit part de ses doutes.
« Tu deviens parano, Santa, mais je vais demander à ce qu’on vérifie les caméras de surveillance. »
C’était aussi la période des dons. Une sorte de caisse avait été installée, et les gens pouvaient déposer des cadeaux à l’intention du Secours Populaire. Quelque chose pour changer de l’alimentaire. Ça pinçait un peu le cœur de Sam. La caisse n’était pas très remplie. Le centre commercial non plus, d’ailleurs, pour un mercredi.
Arriva Anna. Rayon de soleil dont Sam avait bien besoin, elle était agent d’entretien et lui apportait à la pause un chocolat chaud. Sam savait que c’était du fait maison. Le lait était onctueux, et elle utilisait du cacao et du miel, pas de la poudre chocolatée. Du luxe total. Sam sortit deux muffins de son sac caché sous l’étalage des lots et ils eurent une pause digne de ce nom.
Anna remarqua, en buvant son cacao: «Ils offrent des armes aux enfants? »
Elle montrait à Sam un objet noir presque glissé sous l’étalage des lots. L’étalage était formé d’une large planche sur des tréteaux. Le tout disparaissait sous un manteau de papier cadeau. Les lots étaient disposés dessus. Effectivement, on voyait au sol un curieux objet noir dépassant du papier cadeau.
« On dirait un paintball, commenta Sam. Curieux qu’ils offrent ça, ça peut faire des dégâts.
Il voulut saisir l’objet, mais une femme vint déposer dans la caisse différents jeux pour enfants venus de Nature et Découvertes soi-même.
« Merci de votre générosité! » dit Sam avec sincérité. Son moral remontait. Anna avait attrapé l’objet suspect et le soupesait. Puis, elle le posa sur l’étalage, contre le mur, à un endroit où il ne serait pas en évidence.
« C’est bizarre, tout à l’heure j’ai vu deux types un peu louches, en bas. J’avais l’impression qu’ils cherchaient quelqu’un…»
Elle partit reprendre son poste et Sam se leva pour faire les cent pas devant son stand. Il était mal à l’aise. Curieusement, le lanceur/marqueur lui évoquait le fusil de Tchekov. Peu de clients passèrent. Il était encore trop tôt dans l’après-midi, peut-être.
Et ce fut à ce moment-là.
D’abord, des cris et des bruits de bousculade montèrent du rez-de-chaussée. Le vigile se précipita pour regarder par l’escalator. Devant la Fnac, un type très énervé criait « pas toucher moi! », et déjà des agents de sécurité l’entouraient.
Le vigile empêcha les gens de prendre l’escalator et descendit aider ses collègues, Sam indiqua aux clients l’escalier à l’autre bout de l’étage.
Les gens regardaient, bêtement curieux, ou s’en allaient. Aujourd’hui, on ne savait jamais jusqu’où…
Sam resta à son poste à l’étage.
Il vit alors la femme qui avait donné les jeux pour enfants qui regardait une vitrine en face de lui. Un homme arriva en courant et Sam sut ce qui allait se passer. Il cria « attention » mais le type arracha le sac de la dame. Elle fut projetée au sol par le choc. Sa tête heurta le carrelage.
Et Sam fut instantanément envahi de colère.
Elle monta de loin, elle était trop bien nourrie et depuis longtemps. Elle guida Sam vers le lanceur caché sur le stand, et l’envoya ainsi armé courir après le voleur de toute sa force.
Le type courait, poursuivi par Sam. Quelques clients crièrent. Sam hurla « dégagez! » à un groupe d’ados mous qui barraient le chemin. Ils servirent au moins à freiner le voleur, et ce fut la victoire de Sam. Pris au dépourvu, le type avait dépassé le palier qui menait à l’escalier, et maintenant il n’avait plus nulle part où fuir, Sam lui barrait la route.
Le voleur sortit alors quelque chose de sa poche.
Une voix de femme parvint à Sam « Attention! C’est un couteau! »
Sam braqua son arme sur le type, et lui cria « Lâche ça et colle-toi par terre! » Il n’était pas sûr d’être bien compris. Le type faillit tourner de l’œil en voyant l’arme qui le visait. Il lâcha son couteau et leva les mains « Attends, mec, calme-toi…voilà le sac…j’allais rien faire…si y’a de la drogue ou un truc dans le genre dedans, ça me regarde pas…je savais pas…pardon, pardon»
Sam tenait l’arme droit devant lui. Il ne comprenait pas l’attitude du type. Il cria à nouveau « allonge-toi par terre! »
Le voleur émit un curieux râle de peur « haahaahhaa… » et commit un acte désespéré. Il devait avoir la certitude que, de toute façon, le Père Noël allait le fusiller à cause du sac. Un affreux malentendu.
Il jeta le sac de toutes ses forces sur Sam, qui fut un instant décontenancé. Il ne lâcha pas son lanceur et s’en servit pour détourner le sac qui arrivait sur lui. (Un sac original, d’ailleurs, noir et décoré d’épingles à nourrice et de médailles. Un peu rock, quoi.)
Quand il reprit sa position de combat le type fonçait sur lui. Sam appuya alors sur la gâchette, pour l’arrêter d’une balle de peinture. Il visa le corps. Le recul de l’arme le surprit, et le renseigna sur la vraie nature de l’engin. Une déflagration retentit, le type se jeta au sol et des éclats jaillirent du mur. Sam contempla le revêtement mural, en pierre reconstituée. Il venait d’en flinguer un beau morceau.
Il entendait la voix d’Anna «Non! Ne tirez pas! On croyait que c’était un marqueur…de paintball! »
Il entendait aussi « Police! Tu poses ton arme, doucement, tu te couches sur le sol! »
Quelques heures plus tard, Sam buvait un café lyophilisé en écoutant l’un des policiers qui l’avaient arrêté.
« Aux dires des témoins, au vu de vos antécédents inexistants, et surtout des caméras de surveillance, on est d’accord: vous avez réellement voulu jouer au héros avec un paintball. Néanmoins vous restez impliqué dans l’affaire. Je ne n’éloignerais pas si j’étais vous. Vous auriez pu causer un vrai drame avec cette arme.
– Vous ne croyez pas que j’y pense? Aux enfants et aux clients ? Et, au fait, on appelle ça un marqueur ou lanceur de paintball.
À ces mots, Sam sent un fou rire le prendre. Il ne sait pas ce qu’il risque. Heureusement, personne n’a été blessé. Maudit marqueur de Tchekov.
Le Père Noël n’est pas une ordure
Virus avait mitonné son plan depuis des mois, observant méticuleusement les rondes des autres vigiles. A cette période de l’année, il savait que la sécurité serait en sous effectif pour cause de « vacances d’hiver » :chance octroyée à ceux qui peuvent se permettre de quitter quelques jours, la prison qu’ils se sont eux-mêmes bâti.
Dans ce centre commercial, qu’il connaissait par cœur, il y avait laissé une bonne quinzaine d’années, à faire le pied de grue devant les boutiques où des gens bien plus fortunés venaient claquer leur blé. Il y avait les gens de classe moyenne, venus lécher les vitrines à défaut de se faire plaisir, à l’affut de la promo ou de la seconde main qui leur épargnerait de se ruiner sous le sapin. Les autres, les bras trop courts pour porter toutes leurs emplettes, avides de caprices dont on singera la joie sur les réseaux sociaux avant de tout revendre sur le Bon Coût, lassés au bout de deux semaines d’utilisation.
Virus était devenu trop vieux pour continuer à montrer le dos pour se faire battre. Lassé de sa paie au lance-pierre, des heures vides à faire les cent pas, de sa retraite qui semble reculer chaque année, des remarques humiliantes de son supérieur qui, à la moindre occasion, jubilait d’avoir un ascendant sur l’ancien repris de justice qui tenait à tout prix à garder son emploi et un semblant de dignité. Virus en avait marre de baisser son froc devant cette bande de petits connards en cravate, qui offraient volontiers des leçons de bien-pensance alors qu’ils n’avaient jamais été inquiétés par la peur, la faim ou le froid. Marre de les voir claquer l’équivalent d’un mois de courses alimentaires juste pour une montre qu’ils portaient deux fois dans l’année.
Quand Lust avait intégré l‘équipe, ils s’étaient reconnus. Amis de galère, se soutenant d’abord au travail puis dans la vie. Il était présent quand Lila, la femme de Virus, avait révélé son cancer du sein. Il fallait des traitements que la mutuelle ne couvrait pas, un précieux poison à 4 chiffres pour la garder en vie. Alors, une petite idée s’était immiscée dans leurs cerveaux. Comme une métastase qui ne tarda pas à coloniser toutes les régions de leur pensée, nécrosant jusqu’à leur sens moral. Il suffisait d’un petit caillou de quelques carats pour sauver une vie. Lila était forte, elle pouvait survivre avec un mari en taule mais pas sans sa chimio.
Il jeta un œil sur son acolyte qui posait les décorations clignotante en haut des portes d’ascenseurs. Comme convenu, Lust encombrait volontairement la vision de la caméra de surveillance n°3 à renfort de guirlandes pailletées. Virus se gratta nerveusement sous sa barbe synthétique, il transpirait abondement malgré les courants d’air glacés qui s’engouffraient par le hall d’entrée. Il sentit dans sa poche le poids de son Desert Eagle, et posa le doigt sur la gâchette prêt à dégainer son arme. Maintenant ou jamais ! Il descendit de son traineau et se dirigea vers la bijouterie « Oh my Gold ! » dont la fermeture était prévue dans M – deux minutes. Il enjamba un lutin en plâtre, la main ferme sur la crosse de son flingue dépassant largement de l’ourlet duveteux de sa poche. C’est alors qu’ une petite main lui agrippa le manteau. « Une photo Santa, please ! » Il ne s’y attendait pas. Une fillette avec deux chignons crépus au sommet du crâne le regardait de ses grands yeux noisettes d’un air suppliant. Sa mère tout sourire, lui tendit un billet d’un dollar avant de brandir son iPhone dans sa direction pour immortaliser l’instant. Virus s’en retourna vers ses rennes et aida la petite à se hisser sur son genou pour la photo. Il lança un regard en coin et vit Lust juché sur son échelle qui secouait la tête d’un air dépité.
En face de lui, le bijoutier sortit de la boutique et activa le code de l’alarme. Le rideau de fer s’abaissa dans un grincement morne, c’était trop tard. A l’abri derrière sa barbe fournie et ses petites cluques rondes, Virus chancelait entre colère et soulagement, esquissa un sourire feint , yeux embrumés de larmes. Il y a des miracles de Noël qui feraient mieux de rester dans la crèche.