Sous sa douche de fin de journée, Jojo l’épicier méditait en grommelant.
C’est qu’il était enfin parvenu à l’inviter au restaurant, la grande bourgeoise blonde qui tous les jours fréquentait son petit magasin.
Des semaines et des mois durant, il s’était rincé l’œil discrètement, alléché et émoustillé par la corpulence de ses nénés!
Seulement voilà, la belle avait ses exigences: originaire de Boulogne, elle voulait du poisson frais de cette provenance et le meilleur, de préférence.
En bref, elle voulait faire bombance avant de lui donner sa chance.
Sûr qu’il allait devoir banquer s’il voulait pouvoir espérer la culbuter!
De part son boulot de petit intermédiaire fricotant parfois avec la misère, il le savait depuis longtemps: chaque plat de poisson est payé cinq fois au fisc et une fois au pêcheur.
Sourire. C’est un texte que je dirais… “célinien” (Louis Ferdinand…) ! Ne le prenez pas comme une insulte, hein ? J’y retrouve la notion de “misère digne” (la pire, disait-il dans une interview dans laquelle il tentait de se reconstruire un passé qui puisse peut-être le réhabiliter ?…)
En tout cas, “Mort à crédit” n’est pas loin. Lui aurait peut-être préféré “nichons” à “nénés” ; mais lui était médecin, vous poétesse.
Décidément, vous me faites voyager Sklaera. Merci ! Et bravo pour la digestion que vous faites des contraintes…
(Guillaume)
Merci, Guillaume, c’est gentil. Et puis non, je ne prends pas la référence à Céline comme une insulte, sa plume était extraordinaire, il ne faut pas l’oublier, même si ses opinions ont pu sentir le souffre. Faire un autodafé de “Voyage au bout de la nuit” ou de “Mort à crédit” serait une belle imbécilité, à mon humble avis.
C’est mal emmanché cette affaire avec Jojo l’épicier… Bonne chance quand même!