AlgoZimage du 14 juillet 2023

« La liberté guidant le peuple », la toile est immense, je la regarde, petite devant l’œuvre. La liberté est femme, elle avance pieds nus sur un monceau de gravats, de morceaux de bois, de cadavres aussi, de blessés la regardant telle une déesse. Elle avance u drapeau dans une main, dans l’autre une baïonnette. Elle avance sans armures, sans protection, la poitrine découverte, la mine farouche. On se doute qu’elle a harangué la foule, je la pressant parlant à ses hommes, ses femmes, elle dit qu’il faut se battre, se soulever face aux tyrans, aux oppresseurs. Elle n’a que sa volonté, sa voix, son courage, sa détermination, elle avance. Combien de temps faut-il aux hommes pour se soulever ? Pendant combien de temps doivent-ils rester genoux à terre, à plier l’échine, la tête courbée, le regard vide ? Combien de temps à obéir, à être opprimé ? Combien de temps à subir la morgue des dirigeants, leur mépris affichés ? Combien de temps faut-il pour se redresser ? Faut-il attendre de n’avoir plus rien, de n’être plus que l’ombre de soi-même ? Combien d’insultes, de coups faut-il supporter ? Combien d’humiliations, de chaines portées, de mouvements entravés, de paroles étouffées, d’idées avortées ? Doit-on s’oublier devant les tyrans et leurs meutes serviles ? Combien de jougs portés avant de les déposer et de se redresser ?
La liberté est femme, fière et rebelle. Elle exige un prix, car pour vivre sans Dieu ni maître il faut du courage, celui de croire en l’humanité, de croire que l’homme est bon, que le pouvoir ne peut corrompre sa nature profonde. Il faut croire en l’homme, croire en l’autre et en soi, croire au respect mutuel. Ne pas chercher le pouvoir, la domination, à prendre l’ascendant. Elle fait aimer la solitude, prendre ces chemins d’incertitudes et de doute. La liberté est nue, offerte à la mitraille, à la vindicte. Elle est une, entière, n’admet pas les demies-mesures. Elle rayonne dans l’esprit, le cœur, se révèle dans l’œuvre lentement ébauchée et qui se dévoile maintenant aux yeux incrédules. Elle éclate en poèmes, en chansons, elle crie sa haine des tyrannies, fustige les faibles. Elle est femme, sait les douleurs, console des illusions perdues et des vies laissées derrière soi. Elle berce l’esprit des hommes et enfante l’âme des peuples. Elle est une, indivisible, forte et fragile à la fois. Derrière les barreaux des prisons, elle veille. Elle trépigne, redresse la tête, éclate en révolte, et le front haut affronte l’adversité,  et conduit vers d’autres lendemains. Peut-être les jours qui viennent ne seront pas meilleurs, mais les contraintes seront choisies et les rêves ne seront plus enfouis. Et la Liberté est tellement belle !