L’éclat froid de la lune jetait un chemin de lumière argentée sur les sombres champs marins. La faible luminosité ambiante ne laissait aucun doute à Mirlem, son ravisseur se tenait à la barre et l’étrave du bateau coupait le flot noir en gerbes d’écumes luminescentes, traçant une route rapide vers les hauts-fonds. Allongé sur le pont sous le portique du chalutier, le jeune homme sentait l’humidité pénétrer ses os. Ses jambes ligotées étaient prises dans le chalut prêt à être déroulé. Un angoissant silence remplit la nuit épaisse quand les moteurs se turent, puis la voix puissante du nain en combla l’espace : « L’avaleur, pièce-maîtresse qui manque à ma fabuleuse collection, adore la chair humaine ; soit honoré de participer à ma quête ». A cette inquiétante annonce succéda le ronronnement du moteur du treuil et Mirlem, priant le dieu de la mer de venir à son secours, se sentit glisser lentement hors du bateau.

« Bravo Neptune, c’est bien, tu es une brave bête. » Arraché aux terreurs océanes par la voix familière de sa sœur, Mirlem ouvrit difficilement les yeux. A demi-immergé dans les plantes aquatiques des rives du lac de Beaubourg, les jambes encore liées par les rênes enroulées à ses chevilles, le malheureux cavalier fut tiré hors de l’eau par la jeune femme aidée de l’animal puissant. Une profonde blessure à la tête pulsait des ondes douloureuses et en irradiait son crâne, mais le soulagement d’échapper au monde de cauchemar qu’il venait de frôler adoucissait toute peine. « Quelle façon idiote de partir à la pêche » ironisa sa sœur tout en le libérant de ses entraves.

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