La lente promenade dans la nécropole royale donnait le tournis à Jules qui ne rêvait que de courir à l’extérieur, respirer l’air du printemps et crier sa joie d’être en vacances. Il ne trouvait aucun charme à la litanie des rois de France que sa sœur ainée, passionnée d’histoire de l’art, n’en finissait pas de lui débiter. Elle prenait plaisir à examiner chaque tombeau, trouvant d’infimes détails qui la faisait jubiler, et était penchée sur la représentation fidèle de Louis X le Hutin lorsqu’elle interpela son frère :
– Regarde, je trouve qu’il a ton nez.
– On sort bientôt ?
– On vient juste d’arriver il y a dix minutes, tu ne vas pas me pourrir la visite, j’ai bien l’intention de les voir tous. Je croyais que tu aimais la sculpture.
– Uniquement Jeff Koons. Ceux-ci me laissent de marbre, pouffa l’adolescent en évitant la tape de sa frangine. La paleur marmoréenne, c’est pas mon truc, je préfère la peinture et la couleur.
Le jeune garçon se plongea dans la lecture de la documentation affichée à l’entrée de la basilique.
– Le Bel, le Bon, le Sage, on dirait qu’ils avaient toutes les qualités, on aurait dû les garder, c’est pas les présidents qu’on surnomme comme ça aujourd’hui. Y a aussi le Juste et le Modeste ? gloussa-t-il.
– Le Juste, c’est Louis XIII, mais son gisant a été détruit à la révolution, répondit doctement l’érudite. Le Crétin, cherche pas, c’est toi le roi.

Vexé, l’ado abandonna sa sœur à sa lente progression au milieu de l’opacité blafarde des sculptures de pierre et s’avança à la croisée du transept. Un rayon de soleil opportun attendit ce moment pour frapper au cœur de la rosace. Devant Jules fasciné, une pluie de gouttes multicolores échappées du pinceau facétieux d’un géant éclaboussa la nef et la blancheur des tombeaux se trouva somptueusement maquillée de lumière.

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