La Mezzoni
Il était une fois, dans une riche contrée bottée d’une grande mer bleue, une famille de pauvres paysans qui ne comptait qu’un parent, deux enfants et un chien. Tous trois rêvaient d’agrandir la maisonnée, mais rien n’y faisait ; une vilaine sorcière, jalouse de leur bonheur, leur avait jeté un sort !
La Mezzoni, c’était le nom de la démone, n’en était pas à son premier mauvais coup. Elle s’en prenait à tous, ou plutôt à tous ceux qui ne lui ressemblaient pas. Ce qui lui faisait le plus horreur, c’était les gens de couleur. Pour elle, on ne pouvait être vraiment humain que lorsqu’on était blanc. Parfaitement blanc. Et blond, de préférence.
Une autre de ses bêtes noires, c’était la babouche. Georgietta la Terrible, ainsi surnommée par ses valets, ne pouvait tolérer qu’on portât autre chausse que la botte ! Conséquemment, tout ce qui marchait sur sandale, espadrille ou babouche subissait ses foudres.
Une autre encore, de ses abhorrations, c’était « l’aile j’ai bêté », cette particularité qu’ont certains êtres humains de ne pas accepter le stéréotypé de la binarité. Il faut vous dire que la sorcière ne fut jamais brûlée. Bien au contraire d’un pacte avec le Diable, c’est à l’Église qu’elle s’adressa, et, la botte faisant foi…
Mais, conter toute sa méchanceté prendrait une éternité, car il faudrait aussi parler du roi fantoche qui l’engendra, de ses cousins hongrois, et grecs et suédois et polonais, et peut-être même de ceux qui les rejoindraient le sur-lendemain… Non, non, cela serait bien trop long, et de toute façon l’on connaît tous cette histoire : elle ne fait que se répéter dans les chaumières depuis la nuit des temps. Alors, à quoi bon ?
Cependant, il en est une partie, de cette histoire, que seul l’artiste peut voir. C’est qu’elle est bien cachée, cette partie cachée. Nous, le commun des mortels, sommes dotés de pauvre sensibilité quand le poète et le peintre en sont, au contraire, si souvent saturés. C’est ce qui les fait voyants, quand nous ne sommes que voyeurs.
Eh bien là, justement, nous avons un tableau ! Et plus encore qu’un tableau, nous avons un témoignage ! Oui, un témoignage, car la peintre qui l’a peint, ce tableau, c’est cette petite fille tout en douces rousseurs et traînant par la main son gamin de frangin qui traîne encore le chien ! Elle a grandi, et nous livre l’histoire, dans sa partie cachée…
« La fée des antres marins a consulté la lune, qui s’est faite poisson-lune pour lui dire de ne point s’alarmer, l’ordre des choses étant écrit. L’orientale sirène a protégé les migrants de son geste élégant, de son souffle puissant. Les astres se questionnaient de la dualité d’un visage bigarré, à la fois noir et blanc, à la fois blanc et noir, sans même s’apercevoir qu’eux-mêmes différaient.
Et la neige tombait en plein été sur la maison isolée, bien loin des préjugés, et les femmes se marièrent, les enfants se firent frères, et La Mezzoni, privée de son Mussobotti auquel personne ne croyait plus, privée de son Papabrûli, auquel personne ne donnait plus, La Mezzoni s’en fut, et maintenant déjà bientôt les hommes s’aiment enfin ! »
Beaucoup de sens dans ce texte et de richesses cachées, un peu comme cette peinture d’ailleurs. J’ai mis un peu de temps à les découvrir l’un comme l’autre mais je n’ai pas regretté de m’y pencher 😊.
J’aime beaucoup le style, poétique à mes oreilles. Jolie interprétation de cette image ; l’intention me plait aussi, mais le message manque de finesse à mon goût. Néanmoins, je pense que l’auteur l’a voulu exactement ainsi.
Bonjour Guillaume, j’aimerais savoir comment il faut faire pour répondre aux AlgoZimages de façon individuelle, comme tu le fais. Je veux dire que l’image apparaisse avec “Réponse à l’AlgoZimage du tant, par @algo” (ou @sklaera si c’est moi, par exemple) sur l’AlgoScène?
Merci de [re]poser ta question (copier/coller ?) – pertinente – dans le sujet du forum “AlgoSupport” que j’ai ouvert il y a quelques minutes, chère Sklaera. J’y répondrai (là-bas… sourire) avec grand plaisir et plus de détails que j’ai déjà tenté de donner (sur le même sujet en fait) ; là, précisément : https://algomuse.fr/forums/topic/algozimages-contributions-perdues-dans-les-limbes/
C’est important pour nous tous. Le forum est “permanent”. Les commentaires de textes (comme ici, d’ailleurs, ta question n’en est pas un, tu en conviens ?) s’enfouissent progressivement dans les “limbes” de l’Algo. La même question reviendra pour de nombreux utilisateur-trices. Or, ne nous faut-il pas “capitaliser” la connaissance pour faciliter l’usage de l’Ago par tous et toutes ?…
Les AlgoZimages (contrairement aux “Algomusements” et aux “Cadexas” semblent avoir la faveur des membres de notre communauté. (C’est aussi un peu à toi qu’on le doit…)
Je crois que ça vaut le coup de s’atteler tous ensemble à fabriquer leur “réceptacle technique” le plus intuitif possible…
Je ne peux rien faire seul. Votre contribution (vos questions, vos suggestions…) me sont définitivement indispensables.
Merci de ta/votre compréhension 🙂
ps : ah, oui, j’ai oublié de signer “Guillaume/Algo”, mais enfin, tout le monde (parmi nous) a bien compris qu’entre Guillaume/Algo/Athena/Candide… il y avait une certaine promiscuité, non ?
Cela dit, pour Athéna, c’est plus compliqué… Demandez @melanie…. (Après tout : “rendre à César…”
OK
Elle est la dernière sirène. Les eaux habituellement si bleues et si claires sont devenues sombres. Elle se meurt, faisant sombrer avec elle les marins impies qui ont résisté à son chant. La lune en croissant s’abîme dans l’eau en compagnie de son amant poisson, pendant que le soleil lui fait l’honneur d’un dernier baiser. Sous son bras une barque chargée de femmes qui lancent des litanies pour l’accompagner en sa dernière demeure. Elle est belle, sa queue en écailles multicolores et aux savants motifs brillent sous son dernier soleil. Des bracelets enserrent ses bras et ses poignets, un lourd collier repose sur sa poitrine nue. Femme fantasme des marins, elle découvre ses seins d’albâtre que d’autres cachent. D’où vient la fascination des hommes pour les seins des femmes ? Peut-être de souvenirs enfouis dans une mémoire reptilienne. Souvenirs de la douceur du lait qui s’écoule dans la gorge, de l’estomac qui se remplit, de la chaleur ressentie, de l’amour perçut ? Elle n’a pas la réponse. Juste là elle essaye d’étaler son corps, sourit au ciel qui la regarde. Sur la colline une femme, deux enfants, un chien, tableau de famille idéal auquel ne manque que l’homme. Peut-être lui a-t-elle pris celui-ci, elle ne sait pas, elle en a pris tellement dans ses filets. Eux qui voulaient tout ! Leurs barques pleines ne suffisaient pas, il en fallait toujours plus ! Ils prélevaient sans vergogne tous ses petits, sans se soucier de leurs tailles, de leurs vies, alevins à peine éclos, femelles lourdes d’œufs comme autant de promesses d’avenir, venaient crever sur les plages dans l’indifférence, rejetés par les mains expertes des trieurs. Aujourd’hui elle se meure, dernier rempart des vies qu’elle protégeait, elle a cédé. La prophétie s’est réalisée, un homme a écouté son chant et est vivant. Mais elle sait pourtant, qu’avec elle se noie l’avenir des hommes, dans ses cheveux de neige se terraient les savoirs anciens, les nœuds des filets, les chants des baleines, les cavalcades des dauphins, les sauts des orques. Les hommes les chercheront maintenant sans les trouver. Elle demeura mythe, légende, aimée et maudite. Les hommes ne se souviendront que de sa queue de poisson, de ses seins nus et de son chant. Ils oublieront son visage, et sa sagesse. Ils oublieront sa beauté, car elle était la mer, née d’elle et faisant corps avec les flots. Lorsqu’ils se la rappelleront peut-être sera-t-il trop tard !
conte aux multiples facettes,fable à l’imaginaire envoutant, récit poétique mais réaliste, histoire fantastique et prémonitoire,,, voilà ce que m’inspire ce très beau texte à nombreux tiroirs et multiples interprétation. bravo