Peu importait la réception de l’œuvre, Théolog était content du résultat et cela lui suffisait. Il contempla ravi le paysage ravagé, les arbres déracinés, le feuillage éparpillé. Il était à peu près évident que le comité d’art religieux lui ayant commandé le tableau, frémirait sous le coup de cette bourrasque iconoclaste.

A l’issue de la messe dominicale, le curé l’avait contacté sans vraiment le connaitre, adressé à lui par le jeune Bygo – ça ne s’invente pas – paroissien enthousiasmé par ses talents de graffeur. Comme chaque dimanche midi, il tapait le carton au bar de la mairie, entouré de groupies qui cherchaient à capter dans sa proximité quelques retombées de sa récente notoriété locale. L’homme d’église, intrigué par son nom d’artiste, lui avait demandé, « Théolog, pourquoi ? ». Souriant d’un air mystérieux, le peintre répliqua « Le créateur me fascine », s’en tint là et ne pipa aucun mot supplémentaire. Satisfait bien qu’intrigué par cette réponse, le prêtre passa commande.

L’œuvre, bientôt achevée, trônait sur le chevalet. Sur la palette saturée de nuances végétales, l’artiste préleva au couteau la touche finale et la déposa sur la toile en un long ruban ocre et vert. La substance colorée se mit à se contorsionner, donnant vie au python qui prit possession du paradis abandonné des hommes.

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