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Toute de vermeil et d’argent ciselée par un maître-joaillier, je formais une corolle enserrant un diamant enchâssé.

Dans cette morne ville de province j’ai attendu fort longtemps, à l’abri d’une vitrine, que l’on vienne m’acheter.

Je commençais même à désespérer.

Parfois quelques regards sur moi se posaient mais tout aussi vite se détournaient.

J’étais certainement trop chère ou bien trop fantaisiste à leur gré.

Une première fois, pourtant, il est venu. C’était un tout jeune homme.

Toute la devanture il a scruté, sans pouvoir se décider. Mais j’ai quand même ressenti que j’étais sa préférée.

C’est que pour lui, c’était un sacré budget.

Deux jours plus tard, il est réapparu, accompagné d’une femme d’âge mur aux cheveux ondulés.

Pointant du doigt vers moi, il murmura doucement: “Que penses-tu de celle-là pour Suzanne, maman?”

Madame Alice, mercière bien connue du quartier, inspecta l’étalage pour acquiescer aussitôt sans une hésitation.

On entendit grincer la lourde porte et la clochette tinter et après un bref pour-parler, je fus lestement saisie par la main du bijoutier pour atterrir dans un bel écrin bleu avant d’être empochée.

“Adieu, mes consœurs de vitrine et bonne chance à vous!”, songeai-je en quittant la boutique pour m’envoler vers mon destin.

Je dus attendre quelques semaines avant de voir celui-ci se préciser.

Ce n’est que le 18 juin 1960 que le Strasbourg-Paris Gare de Lyon me conduisit vers son aimée.

La belle se fit attendre mais le ciel nous aida, le léger retard du train me permit de passer à son doigt.

‘Las! Je compris sur le champ, à son regard un peu indifférent, qu’elle ne m’aimait pas et que sitôt l’amoureux parti, elle ne me porterait plus jamais.

Deux ans passèrent avant qu’ils ne puissent se retrouver.

Je fus alors rapidement détrônée par une aigue-marine ovoïdale, presque digne d’une princesse, ainsi que par une alliance dorée et trente-sept ans dans l’ombre d’un coffret souffris enfermée.

Toute vie ayant une fin, ma propriétaire connut assez tôt la sienne ce qui pour moi sonna l’heure de la liberté retrouvée.

Je m’aperçus que leur fille ignorait tout de moi.

Écoutant son père lui conter mon histoire, elle m’observa, émue et comme émerveillée.

Et depuis ce jour-là, son annulaire je n’ai plus quitté.

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